La Torah et Israël, finalité de la création du monde

« Au commencement D. créa le ciel et la terre; et la terre était un abîme informe et les ténèbres recouvraient l’abîme et le souffle de D. planait sur la face des eaux; et D. dit: que la lumière soit, et la lumière fut » (Béréshit 1:1-3).

Nous savons que la Torah s’appelle réshit, début, comme il est écrit (Mishley 8:22): « D. m’a créée au début de Son œuvre, dès lors, avant toute chose. » Le commentateur Rashi (ad. loc.) explique: « Au début de Sa création - avant qu’Il n’ait créé le monde » (Voir aussi Metzoudat David, ibid. verset 23). La Torah a précédé la création du monde de deux mille ans, comme le disent nos Sages (Avoda Zara 9a) et pendant tout ce temps-là, D. se réjouissait de la Torah comme il est écrit (Mishley 8:30): « J’étais pour Lui un plaisir permanent » (que Rashi explique: pendant deux mille ans). Les Sages disent (Béréshit Rabba 1:1): « Toute la création n’a qu’un seul but: la Torah, c’est pour la Torah qui s’appelle réshit, commencement (Béréshit Rabba 1:4), et par la Torah que le monde fut créé », ou encore: « D. a considéré la Torah et Il a créé le monde, elle a été l’outil de Son œuvre. Son seul but était de donner à Ses élus, le peuple d’Israël, la Torah par laquelle et pour laquelle le monde et tout ce qu’il contient furent créés » (Zohar I 24).

Nous lisons dans le Talmud (Nédarim 32a): « Rabbi Elazar dit: grandiose est la Torah, car si ce n’était pour elle il n’y aurait ni ciel ni terre, comme il est dit: « Si ce n’était pour Mon alliance éternelle, Je n’aurais pas fixé des lois au ciel et à la terre ». C’est une preuve supplémentaire que tout fut créé par et pour la Torah.

Il est écrit par la suite (Béréshit 1:2): « et le souffle de D. planait sur la face des eaux ». L’eau symbolise la Torah (Babba Kamma 17a) comme il est écrit: « Vous qui avez soif, voici de l’eau », et l’eau existe dès le début de la création puisque les cieux eux-mêmes sont composés de feu et d’eau, comme l’indique le mot shamayim, esh-mayim (voir Rashi, au début de son commentaire). Nous voyons que l’eau fut créée dès le début de la création.

La suite du texte indique aussi que le monde fut créé pour la Torah, afin que l’homme puisse servir et observer la Torah et proclamer le Nom de D. dans le monde. Concernant la création de l’Homme, il est dit (Béréshit 1:26): « Faisons l’Homme à Notre image et à Notre ressemblance, qu’il domine sur les poissons de la mer et sur les oiseaux du ciel ». Maintenant que la création est parfaite, dans toute sa splendeur et dans toute sa gloire, l’Homme est créé à l’image de D. et à Sa ressemblance, pour ressembler à D. dans tous Ses actes et tous Ses attributs, pour être saint comme Lui. C’est ce qui est écrit (Vayikra 19:2): « Soyez saints car Moi, votre D., Je suis Saint ». Et l’Homme reçoit une tâche: « Dominez les poissons de la mer », c’est à dire pénétrez les profondeurs de la Loi et de la Torah qui est représentée par l’eau (Babba Kamma 17a), car c’est pour elle que le monde fut créé. Quel est le but de la création, sinon d’observer la Torah et d’obéir aux commandements que D. nous impose? C’est pour cela que l’Homme fut créé en dernier lieu, il vient dans un monde où tout est prêt et ordonné, afin de lui permettre de recevoir la Torah et ses lois.

Sache que la création tout entière est un secret de la Torah et de la sagesse. L’Immanent a voulu élever les esprits nobles, et Il a créé quatre mondes - Atzilout, Bryia, Yetzira, Assyia - dans lesquels il a placé les dix Séphirot: Kéter (Couronne), H’och’ma (Sagesse), Bina (Intelligence), H’essed (Bonté), Gvoura (Puissance), Tiphéret (Beauté), Netzah’ (Eternité), Hod (Gloire), Yessod (Fondement), Malkh’out (Royauté), qui sont les assises du ciel et de la terre. Sans la Torah, impossible de les connaître ni de les comprendre. D’ailleurs les nations du monde, n’ayant pas reçu la Torah, ignorent l’existence de ces principes fondamentaux. C’est dire que toute la création, et tous les trésors qu’elle renferme, visibles et invisibles, n’existent que pour la Sainte Torah.

Si toute la création n’existe que pour la Torah, pourquoi celle-ci débute-t-elle par « Au commencement D. créa le ciel et la terre », et non par le verset: « D. m’a créé au début de Son œuvre, dès lors, avant toute chose », pour décrire ensuite l’ordre de la création? Cela nous aurait enseigné clairement que la Torah avait précédé la création et que le monde fut créé pour elle.

Lorsque le peuple d’Israël se trouvait au Mont Sinaï, il est dit (Shemot 19:17): « et ils se réunirent au pied [littéralement « sous »] de la montagne » ce qui nous enseigne que D. a brandi la montagne au-dessus de leur tête, et leur a dit: Si vous acceptez la Torah, bien; sinon, ici même vous serez ensevelis » (Shabbat 88a). Mais nous savons qu’Israël avait déjà promis: « Nous exécuterons fidèlement tout ce que D. nous commande » (ibid. 24:7).

Il est difficile de comprendre pourquoi D. choisit d’obliger le peuple d’Israël à recevoir la Torah sous la contrainte de cette menace au-dessus de sa tête, étant donné qu’il avait déjà accepté le joug divin de plein gré en disant: « nous exécuterons fidèlement ce que l’Eternel nous ordonne »? (Voir Shabbat 88a, et Tossaphot ad. loc.).

Nous savons que chacun dispose du libre arbitre et a le choix de faire le bien ou le mal en ce monde. Si D. nous contraint à recevoir la Torah, qu’advient-t-il de notre libre arbitre?

Comprenons tout d’abord pourquoi les Enfants d’Israël ont dit (littéralement): « Nous ferons et nous entendrons ». Logiquement, il faut d’abord entendre l’ordre, pour pouvoir ensuite l’exécuter. N’auraient-ils pas dû dire: « Nous entendrons et nous ferons »? C’est l’argument de cet impie qui dit à Rabba en se moquant: « Israël est un peuple qui agit à la légère, ils ont parlé sans réfléchir lorsqu’ils ont dit: « Nous ferons et nous entendrons » (voir Shabbat, ad. loc.).

Il est permis de supposer que le peuple d’Israël n’a pas déclaré « Nous ferons et nous entendrons » sous la contrainte, car bien avant de se réunir au pied du Mont Sinaï, les Juifs savaient que D. veille sur eux et les protège, et ils ont toujours eu foi en Sa providence. Ils savaient qu’ils avaient été sauvés de la fournaise d’Egypte et des quarante-neuf degrés d’impureté (Zohar H’adash Yithro, 39a) parce qu’ils n’avaient changé ni leurs noms, ni leur façon de s’habiller, ni leur langue - ils parlaient hébreu (Vayikra Rabba 32:5). De tout temps, c’est à Lui qu’ils adressaient leurs prières, et c’est de Lui qu’ils espéraient la rédemption de l’esclavage d’Egypte, comme il est écrit (Shemot 2:23): « Et les Enfants d’Israël crièrent et leur appel monta vers D. du fond de leur esclavage. » Déjà avant d’avoir reçu la Torah, les Juifs avaient accepté un certain nombre de commandements à Marra (Rashi, Shemot 15:25), y compris celui d’apporter l’agneau du sacrifice de Pessah’ (ibid. 12:1), l’interdit de consommer ou de posséder du levain pendant cette fête (ibid. v. 15 et 19), le commandement de manger la matza (ibid. v. 8), le rachat des premiers-nés du bétail (ibid. 13:2), le commandement des Tephilines (ibid. 9-16), tout comme l’observance de la sainteté du Shabbat qui est un commandement égal en importance à tous les autres commandements (Yéroushalmi Brach’ot I:5), la circoncision (Béréshit ch.17), et beaucoup d’autres commandements.

C’est dire que les Juifs avaient déjà une certaine connaissance de la Torah bien avant qu’elle ne fût donnée au Mont Sinaï, et ils l’affectionnaient particulièrement étant donné que « Ses voies sont pleines de douceur et tous Ses sentiers emplis de paix » (Souca 32a). C’est pourquoi, lorsqu’ils ont dit « Nous ferons puis nous comprendrons » leur intention était: ce que nous avons déjà pratiqué jusqu’à maintenant et qui nous est commandé par D., nous le ferons, car les voies de la Torah sont bonnes et nous Lui obéirons en tout sans faille, mais cela ne suffit pas. Nous voulons en savoir plus. Que D. nous donne Lui-même d’autres commandements. Entendre la voix de D. correspond à une aspiration profonde du peuple d’Israël, et ils veulent l’entendre encore. C’est le sens de « Yim shamoah tishmah  - Si tu écoutes, et que tu entends la voix de l’Eternel ton D... » (Shemot 15:26), à savoir: si vous respectez sans restriction votre promesse d’écouter la parole de D., vous l’entendrez encore et encore. Tel est le sens de « nous ferons et nous entendrons ».

Nous comprenons à présent pourquoi les Sages disent (Avot III:7): « Celui qui interrompt son étude pour dire ‘Que cet arbre est beau!’ met sa vie en danger ». L’arbre symbolise la Torah comme il est écrit (Mishley 3:18): « Elle est un arbre de vie pour ceux qui s’y attachent, heureux ceux qu’elle soutient ». C’est dire que celui qui interrompt son étude pour dire « que cet arbre est beau! », comme j’ai bien appris la Torah jusqu’à présent... je connais bien le Talmud et les lois, je suis content de moi-même, je comprends la Torah et je n’ai pas besoin de réviser ce que je sais! celui-là se met lui-même en danger, car « la Torah est un élixir de vie » (Yirouvin 54a) uniquement si l’on continue à l’apprendre et à l’approfondir. La Torah présente soixante-dix visages; il existe soixante-dix aspects de la Torah (Bamidbar Rabba 13:15) et l’étudiant doit réviser son étude, faute de quoi, à l’instar de celui qui sème mais ne récolte pas, il oublie ce qu’il a appris (Sanhédrin 99a). Nos ancêtres au Mont Sinaï en sont la preuve: bien qu’ils aient possédé une connaissance de la Torah telle qu’ils ont été nommés « la génération de la connaissance », ils ne se contentèrent pas d’exécuter, ils voulurent aussi entendre la voix de D. pour comprendre la Torah et ses lois. Chacun de nous doit suivre leur exemple car « Le sage écoute et enrichit son savoir » (Mishley 1:8).

Le peuple d’Israël eut donc raison de faire précéder la compréhension de l’action, car celle-ci se référait au passé, et la compréhension à l’avenir.

Et pourtant, la Torah fut donnée sous la menace de la montagne placée au-dessus de leur tête, par contrainte, et sans qu’ils aient la possibilité d’échapper, et ils n’avaient donc pas le choix.

Etant donné que « nous entendrons » concerne l’avenir, nous pouvons comprendre pourquoi D. a brandi la montagne au-dessus de leur tête, bien qu’ils se fussent déjà engagés à obéir à la Torah. De même qu’il existe un corps et une âme, de même il existe une Torah écrite et une Torah orale. La Torah écrite est semblable au corps, et la Torah orale à l’âme et l’un a besoin de l’autre. De même qu’il ne peut pas y avoir de corps vivant sans âme, il ne peut pas y avoir d’âme sans soutien corporel. En disant: « nous ferons et nous entendrons », les Enfants d’Israël n’avaient accepté que la Torah écrite. Il leur suffisait d’obéir aux commandements sans en approfondir le sens et les concepts sur lesquels ils sont fondés. Une obéissance dépourvue de toute velléité de dévoiler les secrets de D. est certainement une bonne chose - « ne scrute pas ce qui est loin de toi ». Mais D. voulait qu’il en soit autrement. Il les a menacés en brandissant la montagne au-dessus de leur tête, disant: Si vous acceptez la Torah, bien, sinon vous serez ensevelis ici-même. Les Enfants d’Israël n’avaient pas la possibilité de s’échapper. Alors D. leur a dit: De même que vous êtes maintenant sous la montagne et que vous n’avez pas la possibilité de fuir, ni à gauche ni à droite, et que vous êtes désemparés, de même si vous n’acceptez que la Torah écrite, vous ne la comprendrez pas et vous resterez perplexes, ne sachant pas où est la gauche, où est la droite, et vous serez privés du bénéfice de la Torah et de ses bienfaits, si bien qu’elle vous ensevelira. Si vous n’acceptez que la Torah écrite, elle sera pour vous comme un corps sans âme qu’il faut enterrer, et vous serez perdus dans la Torah écrite. Vous devez donc accepter également la Torah orale, et alors de cette montagne, vous pourrez aller et venir, car vous aurez aussi une âme. Ceux qui connaissent les profondeurs de la Torah savent que la Torah orale est la révélation du sens caché de la Torah écrite. Le Rabbin Menah’em M. Halpérin dans l’introduction à son livre Eypha Shlema, écrit que la Torah cache des secrets sublimes qui en sont l’âme profonde...

La Torah orale est l’âme et la vie de la Torah écrite, et il est impossible de comprendre l’une sans l’autre. Cela nous permet d’affirmer que D. n’a soumis les enfants d’Israël à aucune contrainte pour recevoir la Torah, puisqu’ils ont déclaré: « nous ferons et nous entendrons » et que D. désirait seulement expliquer au peuple juif que les fondements du ciel et de la terre furent créés dans le but de réaliser à la fois la Torah écrite et la Torah orale, qui en est l’âme et qui est essentielle pour comprendre ce qui est écrit - le corps de la Torah.

La réponse à la question posée plus haut, à savoir pourquoi la Torah débute-t-elle par « Au commencement D. créa » et non par le verset « D. m’a créée au début de Sa voie », devient claire. Le monde fut créé afin que les Juifs reçoivent et observent à la fois la Torah écrite et la Torah orale. Le mot béréshit l’indique, car bé représente la Torah écrite, réshit, la Torah orale, qui sont les fondements de la création du monde, et ce n’est qu’ensuite que furent créés le ciel et la terre. C’est-à-dire: Au commencement, pour la Torah écrite et la Torah orale, D. créa le ciel et la terre, l’univers tout entier, et tout ce qu’il contient.

Au commencement de la création, les cieux furent créés - ils représentent la Torah orale qui est céleste, l’âme de la Torah et ses secrets qui ne sont révélés qu’à celui qui est assidu, persévérant, qui « craint D. et qui désire ardemment Ses lois » (Téhilim 112:1), et la terre fut créée - elle figure la Torah écrite qui est le corps, et fut donnée au Mont Sinaï, qui est humble et soumis comme la terre.

Ensuite il est écrit: « La terre était un abîme informe et les ténèbres recouvraient l’abîme ». C’est dire que si l’homme n’étudie que la Torah écrite (la terre) il ne sera qu’un abîme informe et désolé. N’étant qu’un corps, il ne pourra pas aller et venir librement, et il lui semblera n’être qu’un abîme recouvert de ténèbres. Car l’homme ignorant marche dans les ténèbres sans savoir où il va. Mais alors: « Le souffle de D. plane sur la surface des eaux ». Le souffle de D. qui est la Torah orale, la vie et l’âme de la Torah écrite, plane sur les eaux, et « l’eau c’est la Torah » (Babba Kamma 17a), et alors l’homme peut s’accomplir en ce monde. Comment? « Et D. dit: que la lumière soit ». Afin de comprendre les secrets cachés de la Torah, la lumière est nécessaire; c’est la Torah orale, qui éclaire la Torah écrite. La Torah écrite et la Torah orale sont comme deux amants inséparables. C’est par leur mérite que le monde et toute la création existent.

Israël et la Torah (écrite et orale) forment l’essentiel de la création du monde et le fondement des cieux et de la terre. Ils nous enseignent le sens de la vie et nous indiquent les voies justes. Le monde repose sur le mérite du peuple juif qui observe la Torah écrite et orale et obéit à ses lois telles qu’elles furent données par D., Créateur du monde

 

 

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