Par’o n’a pas laissé passer l’occasion

Après que Yossef a interprété le rêve de Par’o, ce dernier et ses serviteurs ont décidé à l’unanimité de le nommer chef du pays d’Egypte, comme il est dit (Béréchit 41, 39-40) : « Et Par’o dit à Yossef « C’est toi qui seras le chef de ma maison ; tout mon peuple sera gouverné par ta parole. »

Bien que Yossef ait été un esclave, et que d’après les usages égyptiens un esclave ne puisse pas régner, ils ont néanmoins accepté de le couronner, car ils ont donné du crédit à l’interprétation du rêve qu’il proposait. Or, selon cette dernière, l’Egypte se trouvait en danger d’anéantissement durant les sept années de famine qui se profilaient. Ils n’avaient donc pas d’autre choix que d’attribuer un poste élevé à Yossef, et de lui remettre le sceptre de la direction afin de ne pas disparaître par manque de nourriture.

Ainsi, quand les années de famine sont arrivées, (Béréchit 41, 55) « Par’o répondit à tous les Egyptiens : « Allez chez Yossef, ce qu’il vous dira, vous le ferez. » A ce sujet, nos Sages expliquent (Béréchit Rabba 91, 5) que Yossef leur a alors demandé de se circoncire. Ils étaient obligés de lui obéir, car sans lui, le pays d’Egypte aurait été effacé de la surface de la terre en ces sept années de famine.

Il nous faut mieux comprendre cette idée : Par’o, roi d’Egypte, grand impie et gouvernant de la puissance impure de cette époque, avait dit à son propre sujet (Ezéchiel 29, 3) « Mon fleuve est à moi, c’est moi qui me le suis fait ! » Il était aussi loin de la foi en D. que l’est est éloigné de l’ouest ! Comment lui, ainsi que ses magiciens et ses sorciers impurs, ont-ils pu croire aux saintes paroles du tsaddik Yossef, qui leur annonçait que le rêve de Par’o était un signe de la providence, qui faisait précéder le remède à la plaie, afin que les Egyptiens ne périssent pas à cause des sept années de famine à venir ?

Plus encore, comment comprendre que Par’o, cet impie qui se prenait pour un dieu, pour le créateur et le tout-puissant, se soit soumis à Yossef au point d’avouer aux membres de son peuple son incapacité à les aider, et de leur dire « Allez chez Yossef, ce qu’il vous dira, vous le ferez » ? Tentons d’expliquer cela : nos Sages ont dit (Roch Hachana 10b) : « Yossef est sorti de prison à Roch Hachana, jour du Jugement, jour de prière, et jour où nous faisons régner D. sur nous. »

Très certainement, Yossef était imprégné d’une sainteté supplémentaire ce jour-là, et sa prière est montée au Ciel, faisant résider sur lui la présence divine et lui donnant l’apparence éclatante d’un ange de D. Son aspect extérieur lui conférait également splendeur et majesté, comme il est dit (Béréchit 41, 14) : « Il se rasa et changea de vêtements. »

Ainsi, un filet de grâce et de bonté a été envoyé du Ciel, installant autour de lui une aura de sainteté et de pureté. C’est de cette manière que l’esprit impur a disparu de ce lieu : des paroles authentiques ont alors pu émaner de la bouche de Par’o, et celui-ci a reconnu l’évidence et la Providence divine. Il a admis que Hachem est installé sur le trône céleste, qu’Il veille sur Ses créatures, et qu’Il lui avait envoyé précisément ces rêves-là pour qu’il puisse faire précéder le remède à la plaie en anticipant les sept années de famine à venir.

C’est pour cette raison que Par’o et ses serviteurs ont décidé à l’unanimité d’accepter Yossef comme gouverneur, et de suivre tous ses conseils. De même, en constatant que l’impureté avait quitté cet endroit, Yossef a saisi l’opportunité offerte par D. pour sortir de prison, et a proposé : « Donc, que Par’o choisisse un homme prudent et sage. »

Nous apprenons d’ici combien la présence d’un tsaddik et sa parole peuvent susciter la foi auprès de ses voisins, et à quel point un peu de lumière peut repousser beaucoup d’obscurité. Ainsi, lorsqu’on devient apte à recevoir la lumière, toute l’impureté se dissipe. De même, lorsque la foi s’éveille en quelqu’un, l’hérésie disparaît immédiatement de son cœur, et la personne devient attentive aux paroles du tsaddik qui l’aident à progresser dans le droit chemin.

Très souvent, des renégats éloignés de la Torah viennent me voir, et s’installent dans mon bureau face à une bibliothèque remplie de livres saints, dans une pièce où les murs sont recouverts de portraits de tsaddikim, et dans laquelle règne une atmosphère de sainteté. Puis dès que l’on commence à discuter, ils se mettent à pleurer d’émotion, ou baissent le regard de honte et de regret, car ils se trouvent dans une atmosphère de sainteté, face à une personne qui est consciente de la vérité, c’est-à-dire qui croit en D. et qui tente de toutes ses forces d’influencer les autres dans cette voie. Mais puisque le mensonge n’a pas de fondement (Chabbat 104a), le repentir s’éveille en eux dès qu’ils se trouvent face à une vérité stable, même pendant cette période difficile.

J’ai vu dans le livre Marganita que Rabbi Méïr s’est posé la question suivante : dans le récit du rêve de Par’o, il est dit (Béréchit 41, 1) : « Il se voyait debout sur le fleuve. » Mais quand Par’o a raconté le rêve à Yossef, il lui a dit (ibid. 17) : « Dans mon rêve, je me tenais au bord du fleuve. » Pourquoi Par’o s’est-il éloigné de la vérité en racontant son rêve, et a-t-il dit « au bord du fleuve » ? Il répond qu’en réalité, Par’o a voulu tester Yossef, pour voir s’il remarquerait le mensonge.

Ceci rejoint ce que nous avons dit : Par’o a compris qu’il se tenait face à un homme saint, qui, par ses paroles et sa majesté, pouvait chasser toute l’obscurité et l’impureté de ce lieu. Ainsi, tous se sentaient dépendants de lui pour le meilleur ou pour le pire. Or Yossef, le tsaddik, proclamait qu’il n’y a rien d’autre que D. (ibid. 16) : « Ce n’est pas moi, c’est D. qui saura tranquilliser Par’o. »

Alors pour vérifier qu’il ne rêvait pas, qu’il n’était pas dans l’illusion, et se trouvait réellement face à un homme saint, Par’o a modifié la version de son rêve en disant « au bord du fleuve », alors qu’il s’était vu « sur le fleuve ». Ce dernier élément était pourtant un bon signe pour sa royauté, car il est dit (Keritot 5b) : « On oint les rois sur une source afin que leur royauté se prolonge. »

Or en racontant son rêve, il a dit « au bord du fleuve », allusion au fait qu’il se trouvait au bord de sa royauté, dans l’impossibilité de tenir bon et de poursuivre son règne. Et effectivement, Yossef a ressenti ce changement, et a dit que pour donner le remède avant la plaie, le règne de Par’o devait se poursuivre et que pour que le pays d’Egypte ne soit pas ébranlé par la famine, il fallait qu’un homme prudent et sage dirige le pays.

 

 

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