Le repos du corps et de l’âme dans l’étude de la Torah

« Issakhar est un âne musculeux couché entre les collines. Il a goûté le charme du repos et les délices du pâturage, il a livré son épaule au joug, et il est devenu tributaire » (Béréchith 49:14-15).

Rachi dans son commentaire que tous étudient, écrit: « Issakhar est un âne musculeux » - un âne aux os solides, il supporte le joug de la Torah comme un âne chargé d’un lourd fardeau (Béréchith Rabah 99:9). C’est ce que disent les Sages (Avoda Zara 5b): Il faut être comme un taureau qui porte le joug et comme un âne qui porte un fardeau lorsque l’on étudie la Torah. « Couché entre les collines » - tel un âne qui marche jour et nuit de ville en ville. Lorsqu’il veut se reposer, il s’arrête quelque part entre les villes où il a apporté sa marchandise. « Il a goûté au charme du repos » - il a reçu pour sa part d’héritage une terre bénie et fructueuse. « Il a livré son épaule au joug » - au joug de la Torah. « Il est devenu tributaire » - il dispensait à tous ses frères l’enseignement de la Torah et savait compter les années, comme il est écrit (Divrey HaYamim I, 12:32): « Les gens d’Issakhar sont experts dans la connaissance des temps, pour décider de la conduite d’Israël » (Béréchith Rabah 98:12) ».

La bénédiction de Ya’akov à Issakhar concerne le joug de la Torah et les décisions légales qui règlent la conduite d’Israël.

Malgré tout, le verset reste obscur. S’il s’agit du joug de la Torah, pourquoi est-il dit: « Il a goûté au charme du repos », car il n’y a pas de repos dans l’étude de la Torah, ni de jour ni de nuit, et pourquoi le fardeau de la Torah est-il assimilé au repos entre les villes, puisqu’il est dit aussi: « Il a livré son épaule au joug ». Si l’on se repose, il n’y a pas de fardeau (la question fut posée par le directeur de notre Kollel le Rabbin Haïm Walknine, intendant de la Yéchivah Ateret Israël).

Le mot Hamor, âne, a une valeur numérique de deux cent quarante-huit, pour indiquer qu’il porte le fardeau de la Torah avec les deux cent quarante-huit membres de son corps, « comme un âne aux os solides » qui s’occupe de Torah de toutes ses forces. Garèm, musculeux, indique la Guémara qu’il étudie de jour comme de nuit. « Entre les collines » c’est-à-dire entre les pages de la Guémara. Il s’occupe de Torah de jour et de nuit, de tous ses membres, c’est son repos et l’essentiel de son commerce.

Son repos et son délice en ce monde est de s’occuper de Torah de tous ses membres (Torat Kohanim, Vayikra 26:3), il voit les fruits de ses peines, et il est appelé « sage » car « il comprend de lui-même » (‘Haguigah 14a; Sanhédrin 93b). Il est « expert en la connaissance des temps », car il a acquis le goût de la Torah, comme il est écrit (Téhilim 34:9): « Goûtez et sentez combien Il est bon... »

Celui qui s’occupe de Torah jour et nuit en ce monde est récompensé dans l’autre monde, le monde du repos et le vrai héritage, comme il est écrit (Yérémia 31:16): « Tu seras récompensé de tes efforts ». Celui qui ressent un vrai plaisir à l’étude de la Torah et comprend sa valeur en deviendra tributaire, il profitera de chaque instant pour étudier et il ne perdra pas son temps à des choses vaines. Il ressentira alors le vrai repos et le vrai délice et ses efforts seront récompensés. Les gens disent d’une telle personne: « Heureux celui qui a été élevé dans la Torah, qui en a porté le joug, et qui donne satisfaction à son Créateur » (Brach’ot 17a). De plus « Il avance avec des forces grandissantes » (Téhilim 84:8) afin de parvenir à son but et à sa vraie destination qui est l’autre monde. C’est là qu’il reçoit la pleine récompense de ses efforts, car « il n’y a pas de récompense pour l’obéissance aux commandements, en ce monde » (Kidouchin 39b; ‘Houlin 142a).

La suite du verset dit: « Il a livré son épaule au joug », signifie qu’au lieu de rechercher le calme et la tranquillité, l’homme doit supporter le joug de la Torah, y être effectivement soumis comme un travailleur qui remplit son devoir, afin de faire plaisir à son Maître et Créateur (Brach’ot 17a) grâce à son labeur, et même en s’exilant si nécessaire. C’est alors qu’il ressemble à « un âne musculeux qui se couche entre les collines » - lorsqu’il prend le chemin de l’exil pour aller étudier ailleurs.

Le Talmud (Chabath 147b) raconte qu’Elazar ben Arach’ demanda à ses collègues de l’accompagner dans la ville où habitait sa femme, une ville réputée pour la pureté de ses eaux et l’abondance de ses sources. Ses collègues ne répondirent pas favorablement à sa demande, et pour s’y être rendu tout seul, il oublia tout ce qu’il avait appris.

Nous devons méditer ce récit. Est-il possible de croire que Elazar ben Arach’ ait voulu délaisser l’étude et se reposer, et qu’il ait invité ses collègues à en faire autant?

Sûrement pas! Il est certain que Rabbi Elazar ben Arach’ les a invités à venir étudier avec lui en ce lieu dont l’eau est bonne - et « l’eau, c’est la Torah » (Baba Kama 17a; Tana D’Bey Eliyahou Rabah 2:18), comme il est écrit: « Vous qui avez soif, venez vous abreuver » (Ichaya 55a). Rabbi Elazar ne voulait pas abandonner la Torah mais seulement étudier dans le calme. Les autres Sages craignaient ce calme qui risquait de les entraîner à l’oisiveté (c’est ce qui arriva à Rabbi Elazar, qui oublia tout ce qu’il avait appris). Ses collègues avaient raison. Ils sont allés étudier ailleurs et ils ont progressé, tandis que lui oublia ce qu’il avait déjà acquis. Nous apprenons là qu’il ne faut pas se fier à sa propre intelligence (Michley 3:5; Avoth 4:14), ni compter sur ses propres forces, mais au contraire étudier dans la peine qui seule nous permet de retenir les enseignements et de gagner le véritable repos. Les deux explications que nous avons données se complètent l’une l’autre, car il s’agit de la paix procurée par l’étude de la Torah.

Il est possible que ces Sages aient appris à se méfier du calme mentionné dans notre verset: « Il a goûté le charme du repos ... il a livré son épaule au joug, et il est devenu tributaire ». Ce n’est qu’en étudiant la Torah avec peine que l’on en retient les enseignements et que l’on parvient au véritable repos, celui de l’autre monde, où D. nous réserve une juste récompense.

 

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