Le lien entre le peuple d’Israël et la terre d’Israël

« L’habitant du pays, le Cananéen, vit ce deuil de l’Aire-du-Buisson et ils dirent: "Voilà un grand deuil pour l’Égypte !" C’est pourquoi on nomma Evel Mitsraïm ce lieu situé de l’autre coté du Jourdain. » (Béréchit 50, 11)

Les bnei Israël et les Egyptiens ont pleuré le décès de Ya’akov durant quarante jours puis soixante-dix jours supplémentaires. Yossef et ses frères ont quitté l’Egypte pour accompagner leur père à sa dernière demeure et tous les anciens et notables du pays se sont joints à eux. Face à cette immense affliction, le peuple cananéen s’est dit « Voilà un grand deuil pour l’Egypte ! » et ont qualifié le décès de Ya’akov de « deuil égyptien (Evel Mitsraïm) ».

Ceci est très étonnant : il s’agissait d’un deuil pour le peuple juif, pourquoi donc les Cananéens l’ont-ils surnommé « deuil égyptien » ? Quel sens cela a-t-il ?

De plus, Yossef est monté en Canaan accompagné de toute l’armée de Par’o, de ses princes et de ses serviteurs. Ils auraient donc pu facilement soumettre tous les peuples de ce pays. Nous savons bien qu’ils ne craignaient pas de tomber entre les mains de ces habitants : pourquoi alors le peuple d’Israël a-t-il décidé de retourner en Egypte et non de s’emparer du pays à ce moment-là ?

Je pense que les Cananéens ont été très surpris de voir les bnei Israël enterrer Ya’akov en Canaan puis retourner immédiatement en Egypte. En effet, ils savaient que la terre d’Israël leur était promise et qu’ils auraient donc pu y rester et vaincre tous les peuples qui habitaient le pays. De plus, les fils de Ya’akov étaient réputés comme de puissants hommes de guerre qui avaient écrasé tous les peuples alentour, lorsque Chekhem fils de ‘Hamor avait souillé leur sœur Dina.

Mais malgré tout, les bnei Israël sont immédiatement retournés en Egypte dès la fin des jours de deuil, au lieu de combattre les peuples du pays, comme il est écrit « Yossef, après avoir enseveli son père, retourna en Egypte avec ses frères et tous ceux qui l’avaient accompagné pour ensevelir son père » (50, 14).

D’après moi, le peuple d’Israël connaissait les termes de l’alliance conclue entre D. et les Patriarches : ils seraient d’abord asservis et soumis en Egypte pendant quatre cents ans avant de sortir avec une grande richesse, de recevoir la Torah au mont Sinaï et de mériter d’entrer en terre d’Israël. Ainsi, les bnei Israël n’ont pas voulu hâter la délivrance et se sont conduits selon l’ordre de Hachem. C’est la raison pour laquelle ils se sont empressés de retourner en Egypte dès la fin des jours de deuil.

Face à ce comportement du peuple d’Israël, les Cananéens ont défini ce grand malheur comme un « deuil égyptien ». En effet, le peuple d’Israël s’est rendu en Canaan « sous la citoyenneté égyptienne » si l’on peut dire car ils se sentaient encore attachés à l’Egypte. Ils ne se considéraient pas comme un peuple à part entière car ils n’avaient pas encore mérité d’être sauvés et de recevoir la Torah. C’est pourquoi ils se sont dépêchés de retourner à leur travail jusqu’à que D. Lui-même les délivre. Le comportement des bnei Israël a inspiré le respect de D. au sein des nations du monde, forcées de constater que le peuple juif était soumis à Ses commandements. En effet, bien que puissants et accompagnés de toute l’armée égyptienne, les bnei Israël se sont pliés au décret de Hachem et sont rentrés en Egypte.

On rapporte dans la Torah qu’Avimélekh et son chef d’armée Pikhol étaient venus chez Avraham et Yitz’hak afin de conclure une alliance avec eux, engageant le peuple d’Israël à ne pas porter atteinte à leur descendance et à ne pas leur causer de mal. La seule volonté d’Avimélekh de sceller une alliance avec Avraham et Yitz’hak prouve la foi du roi en la promesse de D. : Avimélekh était persuadé que Hachem ferait sortir les bnei Israël d’Egypte et leur octroierait la terre de Canaan où il habitait alors. D’ailleurs le peuple guirgachi, l’une des sept nations habitant alors le pays, a quitté la terre de Canaan avant même d’entamer une guerre. En effet, ils étaient pleinement conscients que cette terre était la propriété du peuple d’Israël.

Comme nous l’avons mentionné précédemment, lors du décès de Ya’akov, tous les princes d’Egypte ont quitté leur lieu d’habitation pour accompagner le défunt à sa dernière demeure. Bien que conscientes que la terre de Canaan appartienne au peuple juif, les nations habitant alors le pays n’ont pas craint que les bnei Israël les chassent pendant le deuil de Ya’akov. En effet, le moment n’était pas encore arrivé pour eux d’hériter de la terre : la première partie de l’alliance ne s’était pas encore concrétisée. C’est uniquement après son asservissement en Egypte durant quatre cents ans que le peuple juif méritera d’être sauvé et d’entrer en Israël.

Les Cananéens ont donc désigné le deuil des bnei Israël pour la disparition de Ya’akov par le nom de « deuil égyptien » car ils ont constaté que cette nation était encore sous la tutelle de l’Egypte et ne se considérait pas comme un peuple à part entière. Ainsi, il n’y avait aucun risque qu’ils les combattent et les chassent de leur terre. L’attitude des bnei Israël a entraîné l’admiration et la glorification du nom divin dans le monde ; tous les autres peuples ont été forcés de constater que les juifs étaient soumis à D. et suivaient Ses voies. En effet, le plus important est d’accomplir Sa volonté puis, ensuite seulement, de considérer l’aspect matériel : la terre d’Israël.

 

Hevrat Pinto • 32, rue du Plateau 75019 Paris - FRANCE • Tél. : +331 42 08 25 40 • Fax : +331 42 06 00 33 • © 2015 • Webmaster : Hanania Soussan