La victoire spirituelle d’Israël dans la servitude de l’Egypte

« Plus on les opprimait, plus ils augmentaient et se multipliaient » (Chemot 1, 12)

C’est comme cela que procède le mauvais penchant. Quand il veut faire tomber l’homme et couper le lien de confiance qui le relie à Hachem, il se rapproche de lui comme quelqu’un qui a besoin de son aide, et alors l’homme s’incline. A ce moment-là, le mauvais penchant lui permet de faire le mal tout seul, et cherche de nouveaux moyens de le contraindre à pécher par des comportements répréhensibles.

Lorsque l’homme se réveille et comprend que tout ce qui lui arrive vient de ce qu’il a abandonné la voie droite, immédiatement il s’humilie, a le cœur brisé et se repent. Alors, quand le mauvais penchant voit qu’il n’a aucun succès, il l’abandonne avec mépris. C’est pourquoi nous devons nous renforcer dans la Torah au lieu de nous laisser entraîner par lui, car dans les termes du Zohar (I 27a), la Torah est douce pour les bnei Israël et amère pour le mauvais penchant, et alors en vérité il nous dédaignera et cessera de nous tourmenter et de chercher à nous faire trébucher.

Quand un juif s’obstine à étudier la Torah pour lutter contre le mauvais penchant, en fin de compte celui-ci finit par le quitter, d’autant plus qu’il ne peut pas supporter la douceur de la Torah. Il y a une allusion à cela dans ce qui est dit à propos des Egyptiens, « ils eurent les bnei Israël en horreur ». En effet, les Egyptiens ressemblent au mauvais penchant, ils avaient en horreur la vie spirituelle et l’obstination des bnei Israël.

C’est pourquoi le Saint, béni soit-Il a puni les Egyptiens. En effet, la promesse était que les bnei Israël soient esclaves pendant quatre cents ans, et eux les ont asservis le double du temps, le jour et la nuit, c’est pourquoi ils sont sortis au bout de la moitié du temps, au bout de deux-cent dix ans au lieu de quatre cents. Les dix années supplémentaires correspondent au temps pendant lequel ils ont dormi pendant ces années-là. Ce chiffre est la valeur numérique du mot « kets » (la fin), deux-cent dix. Comme nous le disons dans la Haggada de Pessa’h, « le Saint, béni soit-Il a calculé la fin ». C’est-à-dire qu’Il a enlevé cent quatre-vingt dix ans au compte de quatre cents ans, et il est resté deux-cent dix ans.

Mais apparemment, cela reste très difficile à comprendre. On sait que la meilleure façon de réussir à soumettre des esclaves est de leur parler doucement au début, et s’ils n’obéissent pas, alors on passe aux paroles dures. Et si cela aussi s’avère inutile, alors on passe aux coups. Et si absolument rien ne marche, alors on les prend en horreur et on les déteste. Alors qu’ici, d’après l’ordre des versets, on voit que les Egyptiens se sont conduits de manière absolument inverse, ce qui est très curieux.

Au début, « Plus on les opprimait, plus ils augmentaient et se multipliaient », c’est la méthode des coups, et ensuite « ils eurent les bnei Israël en horreur ». Et en fin de compte ils leur ont parlé doucement, comme dans l’explication des Sages selon laquelle le mot « befarekh » (un dur travail) peut être lu « befeh rakh » (avec des paroles douces). En vérité, pourquoi les Egyptiens se sont-ils comportés d’une façon aussi bizarre et contraire à la logique et à l’habitude ?

Voici comment on peut l’expliquer. En Egypte, les bnei Israël étaient brisés spirituellement, parce qu’ils étaient en exil et voyaient comment vivaient les non-juifs qui reniaient Hachem. Effectivement, après la mort de Yossef et de toute sa génération, qui était un symbole de la foi en D., les Egyptiens se sont mis à mépriser de plus en plus la providence divine, ce que les bnei Israël avaient beaucoup de peine à constater.

De plus, ils voyaient que les Egyptiens regardaient des choses mauvaises et pensaient à des choses négatives, et c’était pour eux très difficile à supporter. Sans compter qu’ils se disaient : Ya’akov était ici, il a certainement insufflé une certaine sainteté à l’Egypte, et pourtant les Egyptiens continuent à se comporter de cette façon. Alors que de leur côté, les Egyptiens se disaient : Comme leur père Ya’akov est déjà mort, comment les bnei Israël peuvent-ils continuer à se comporter comme lui, sans apprendre de nous ?

Tout cela était pénible spirituellement pour les bnei Israël, et pour ne pas désespérer, ils voulaient étudier la Torah, mais alors les Egyptiens leur ont imposé des afflictions spirituelles, dès le début « ils leur ont rendu la vie amère », et quand ils n’ont pas réussi à les abattre, ils sont passés aux châtiments corporels, « par des travaux pénibles sur l’argile et la brique ». Quand cela non plus n’a pas réussi, ils se sont mis à leur parler avec des paroles douces, dans l’espoir qu’ainsi ils allaient les écouter.

Il s’est d’ailleurs passé quelque chose du même genre dans la guerre entre Ya’akov et Essav. Au début, l’ange d’Essav est venu mener contre Ya’akov un combat spirituel, et ensuite, quand il n’a pas réussi, Essav est venu lui-même pour lutter physiquement. Cela non plus n’a rien donné, si bien qu’en fin de compte il a embrassé Ya’akov et l’a laissé partir devant lui.

On peut aussi expliquer que les juifs sont forts dans leur foi, alors que les non-juifs sont des philosophes qui cherchent constamment à discuter de la vérité. Mais tant qu’on essaie de leur dire quelque chose, ils ne font que s’éloigner de la vérité, alors que le juif a choisi sa foi et sait dès sa naissance Qui a créé tout l’univers.

C’est pourquoi les autres peuples tentent de briser les juifs et commencent directement par la force et les coups, mais sans réussir à ébranler leur foi. Alors ils leur infligent des travaux forcés, mais cela ne réussit pas non plus, car pour le juif il n’y a rien de meilleur que la Torah, c’est pourquoi aucun d’eux ne se laisse briser ni détourner de sa foi, malgré les difficultés qui s’accumulent contre lui, si bien qu’il s’efforcera toujours de vaincre le mauvais penchant.

Nous pouvons en trouver des indications chez Ya’akov. A la fin de la parachat Véyé’hi, il est dit qu’il a été enterré dans le caveau de Makhpela, et on connaît l’enseignement des Sages (Midrach Sekhel To Béréchit 25, 33) selon lequel Ya’akov avait donné sa part de ce monde-ci à son frère Essav pour recevoir une part dans le caveau de Makhpela. Mais on sait également (Sota 13a) qu’au moment de l’enterrement de Ya’akov il y a eu un grand combat, car Essav ne voulait pas permettre qu’on l’enterre là, alors ‘Houchim fils de Dan l’a tué, si bien que même dans sa mort, Ya’akov a vaincu le mauvais penchant, qui est Essav.

C’est ce qui est écrit ici au début de la paracha, « Et voici les noms ». L’expression « Véelé » (et voici) ajoute à ce qui a déjà été dit, à savoir que tous les bnei Israël en Egypte ont continué à suivre la voie tracée par les Patriarches en ce qui concerne les noms : ils ont donné à leurs fils des noms qui avaient été acceptés par eux. Ils ont également tout donné pour la Torah, pour lutter contre le mauvais penchant, parce que c’était leur façon de vivre : suivre la voie tracée par leurs ancêtres dans le service de Hachem et dans la guerre contre le mauvais penchant, sans se laisser détourner de leur foi.

 

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