L’Eternel a en abomination l’orgueilleux

Après avoir traversé la Mer Rouge «toute la communauté des enfants d’Israël partit au désert de Sin pour diverses stations, sur l’ordre du Seigneur. Ils campèrent à Réfidim...» (Exode 17:1). Qu’est-ce que Réfidim? demandent nos Sages (Sanhédrine 106b; Tan’houma, Béchala’h 25): le fait de se relâcher (rafouï) de l’étude de la Torah. Immédiatement après (id. 17:8) «survint Amalek qui attaqua Israël à Réfidim.» Un verset plus haut (id. 17:7) il est écrit qu’«ils avaient éprouvé l’Eternel en disant: Nous verrons si l’Eternel est avec nous ou non.»

On peut se demander comment les enfants d’Israël en sont venus à se dégrader de la sorte après avoir assisté à de si nombreux miracles?

C’est qu’il y a diverses sortes d’orgueil: l’orgueil franc, dont l’homme est conscient; l’orgueil caché, quand l’homme se croit très humble alors qu’en fait la vanité se lit sur son visage; l’orgueil de l’homme juste et intègre, qui «lèse» celui de Dieu.

La remarque faite par les enfants d’Israël «Est-ce que l’Eternel est avec nous ou non?» appartient à cette troisième catégorie. Les enfants d’Israël se dirent: «Qui sommes-nous pour que l’Eternel se trouve avec nous?» Mais ils ont ainsi souillé l’orgueil du Saint, béni soit-Il, seul «revêtu de majesté» (Psaumes 93:1). S’ils L’ont vu lors de la traversée de la Mer Rouge, c’est qu’ils en étaient dignes. S’Il ne demeure pas chez eux, sur qui manifestera-t-Il Sa Majesté et Son orgueil! A cause du Satan, les enfants d’Israël ont ainsi réduit l’orgueil divin.

C’est pourquoi Amalek, incarnation même de l’orgueil (remarquons la similitude des valeurs numériques de Amalek et Ram, 240), les attaqua. La question: «l’Eternel se trouve-t-il avec nous ou non» a affecté l’orgueil de Dieu, et comme l’Eternel juge «mesure pour mesure», Amalek a refroidi leur cœur (cf. Deutéronome 25:18)... L’homme doit par conséquent effacer dans son cœur la mémoire d’Amalek (id. 25:19). Mais s’il sent une nouvelle attaque, c’est un signe que l’humilité lui fait défaut et qu’il se laisse encore dominer par l’orgueil... Commentant à cet effet le verset: «Puisque sa main s’attaque au trône de l’Eternel, guerre à Amalek de par l’Eternel, de génération en génération» (Exode 17:16), les Sages (Tan’houma, Tétsé 11) expliquent que le nom de l’Eternel ne sera parfait qu’après l’effacement de la descendance d’Amalek. Lorsque disparaîtra l’orgueil, le Nom de l’Eternel ne sera plus souillé.

Nous pouvons voir les effets nocifs de l’orgueil dans le cas du père d’Elicha’ ben Avouya, connu aussi sous le nom de A’her (l’«Autre») (’Haguigah 15; Tossafoth Chouvou). Pour la cérémonie de la circoncision de son fils, il avait invité tous les grands de Jérusalem... Pendant qu’ils parlaient de Torah, le feu descendit du Ciel et se faisait menaçant. «Si telle est la force de la Torah, dit Avouya, je lui consacre mon fils.» Mais comme il ne recherchait pas la gloire de Dieu, Elicha’ se pervertit parce que son père voulait se faire honorer par la Torah de son fils. Son orgueil souilla ainsi l’âme d’un bébé de huit jours.

C’est ce que nous trouvons aussi chez Yérovo’am ben Névat (Sanhédrine 102b) à qui l’Eternel dit: «Reviens sur le bon chemin, et Moi, toi et Ben Ichaï, nous nous promènerons dans le jardin d’Eden.» «Qui sera en tête?» demanda Yérovo’am. «Ben Ichaï!» répondit l’Eternel. «Je ne suis pas d’accord!» conclut Yérovo’am... qui ne pouvait se départir de son orgueil.

En fait, les enfants d’Israël avaient quelque raison de se demander s’ils étaient dignes de «cohabiter», si on peut dire, avec Dieu dans les mondes inférieurs. D’où vient l’homme après tout? D’une goutte putrécible... (Avoth 3:1). Pourquoi alors Dieu cohabiterait-Il avec lui? N’est-il pas écrit: «Les cieux, les cieux sont à l’Eternel, mais la terre il l’a octroyée aux fils de l’homme» (Psaumes 115:16). Leurs pensées n’étaient donc pas condamnables, seulement il faut croire que Dieu régit individuellement chacune de Ses Créatures, même en bas. Ainsi ce seul doute affecte l’orgueil et la gloire de Dieu.

Tout cela est l’œuvre du Satan qui soulève de nombreuses questions chez l’homme, et lui refroidit le cœur... Il finit même parfois par le rendre athée, à Dieu ne plaise.

Mais du fait que cette faute des enfants d’Israël était légère, subtile, Amalek leur refroidit le cœur, comme nous l’avons vu plus haut. Dans le terme HaYeCH on trouve le Nom de Dieu YaH, dont ils ont affecté la Majesté, et qui a la même valeur numérique (15) que GAaVaH (l’orgueil). Quant à la lettre chin, elle a la même guématria (300) que KaR, le refroidissement de leur cœur engendré par leur question, leur doute: «se trouve-t-Il avec nous ou non?»

Au mois d’Adar (le Chabath Zakhor) on lit la section biblique se rapportant à Amalek, incarnation même de l’orgueil. Or ce mois symbolise l’humilité, celle de Moïse, né et mort le 7 Adar (Méguilah 13b; Esther Rabah 7:13). En outre, le premier du mois, on lit la section hebdomadaire traitant des chékalim, qui nous incite à nous éloigner de l’argent, qui engendre l’orgueil. Dans le mot CHéKeL, chin a la même valeur numérique (300) que KaR. Quant aux deux dernières lettres du mot, KaL (léger), elles forment les dernières lettres de AMaLeK. Amalek refroidit le cœur de l’homme et le dissuade de faire preuve d’humilité: c’est l’œuvre du Satan qui ne cherche qu’à remplir l’homme d’orgueil. [Amalek, c’est aussi ’AM KaL, un peuple léger, car on ne peut prendre tout à la légère  ils se circoncisaient et jetaient sarcastiquement en l’air la peau du prépuce en rigolant et en blasphémant  que si on est orgueilleux. Chaque chose ayant sa contrepartie dans la sainteté, le correspondant de Amalek qui prenait tout à la légère est le Roi David, l’humble et doux chantre d’Israël qui représente le bouffon du Roi (Dieu), dans la sainteté...]

En outre, ADaR, a la même valeur numérique (205) que HaR (montagne), que représente le mauvais penchant pour les Tsadikim (Soucah 52a; Zohar I, 190b). C’est ce même yetser hara’ qui emplit l’homme d’orgueil et l’empêche d’étudier la Torah (Tan’houma, Ki Tavo 3). La Torah a été donnée sur la montagne, qu’on peut vaincre par son étude dans l’humilité (Avoth 6:6). Avant le don de la Torah, Dieu interdit aux enfants d’Israël de se rapprocher de la montagne (le Mont Sinaï), comme il est écrit: «Gardez-vous de gravir cette montagne et même d’en toucher le pied...» (Exode 19:12) car il faut toujours s’éloigner au maximum du mauvais penchant et de l’épreuve. Et c’est pour la même raison que Dieu a choisi la plus petite montagne du globe, celle qui s’est abaissée le plus, pour le don de la Torah.

On peut se demander à cet effet, pourquoi les dés jetés par Haman (qui voulait savoir quel était le mois le plus propice à la chute d’Israël) indiquèrent précisément le mois d’Adar (Méguilah 13b). C’est que, on le sait, il n’y a pas de mazal pour Israël (Chabath 56a; Nédarim 32a; Tikouné Zohar 100a), c’est-à-dire quand les Juifs s’engagent dans l’étude de la Torah, ils ne sont plus régis par les constellations, comme les nations: ils se trouvent au-dessus de la nature. Mais maintenant que les enfants d’Israël négligeaient l’étude de la Torah, pensa Haman, ils étaient de nouveau régis par les constellations. L’Eternel trompa cependant Haman, et le sort fut jeté sur le mois d’Adar. Mais les enfants d’Israël comprirent l’allusion: comme nous l’avons vu plus haut, Adar a la même valeur numérique (205) que har, la montagne, le mauvais penchant, auquel ils étaient prêts à livrer bataille. Ils décidèrent de faire téchouvah, de s’engager assidûment dans l’étude de la Torah, et de ressembler à Moïse (né au mois d’Adar), c’est-à-dire de renaître par cette étude.

On comprend maintenant pourquoi nos Sages ont dit: «Quand entre Adar, on doit multiplier la joie» (Ta’anith 26b). Pourquoi précisément à Adar? N’y a-t-il pas de fêtes dans presque tous les mois de l’année? C’est que, ayant négligé l’étude de la Torah, les enfants d’Israël retrouvèrent la joie en l’étudiant de nouveau. Car «les préceptes de l’Eternel sont droits: ils réjouissent le cœur» (Psaumes 19:9). Comme l’enseigne enfin le Talmud (Chabath 88a), ils ont reçu Hadar (la splendeur, la Torah) au mois d’Adar, du temps d’A’hachvéroch (cf. Esther 9:27).

«Le peuple vit que Moïse tardait à descendre de la montagne» (Exode 32:1). Le mauvais penchant sème le doute chez l’homme: «Dieu se trouve-t-Il vraiment avec nous?» Il ne vise ainsi qu’à lui faire souiller le Nom de l’Eternel. L’homme doit par conséquent tirer la leçon de la sortie d’Egypte et ne croire qu’en Dieu et en Moïse son serviteur. Yithro comprit que la question que s’étaient posés les enfants d’Israël: «L’Eternel est-Il avec nous?» ne faisait que montrer l’humilité dont-ils faisaient preuve, alors qu’il est possible que ce soit de la fausse modestie... Il n’en demeure pas moins que Yithro comprit la leçon, rejeta tous les honneurs, et vint humblement au désert pour écouter la parole de Dieu.

A ce point, nous pouvons comprendre les propos de Rabbi Yirmiyah ben El’azar, selon lequels l’enfer a une porte dans le désert, une seconde dans la mer, et une troisième à Jérusalem (’Irouvin 19a). Dans le désert, c’est le concept de Caïn et Hével; dans la mer, c’est celui du prophète Yonah; le penchant du mal se trouve aussi bien dans le désert que dans la mer. Le yetser hara’ se trouve également à Jérusalem, bien que ce soit un lieu saint.

Le désert fait aussi allusion à celui du Sinaï; si l’humilité ne s’y trouve pas (condition pour acquérir la Torah), il représente alors une des portes du guéhinam (cf. Midrach Hagadah, ‘Houkath 21:19). La mer fait allusion à celui qui assiste au grand miracle du passage de la Mer Rouge en se demandant: «L’Eternel est-Il avec nous?», seconde porte de l’enfer. Enfin, celui qui se rend à Jérusalem, source de la sainteté, sans se repentir et rechercher le bien, fait preuve d’orgueil qui affecte le Nom de Dieu. Tout homme se doit par conséquent de raffermir constamment sa foi et d’être toujours humble.

 

Qu’arrive-t-il si on s’abstient d’étudier la Torah
Table de matière
La sortie d’Egypte prépare la réception de la Torah

 

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