«Tout provient de Toi» - (7 Adar, hiloulah de Moché Rabénou)

Traitant toujours du même verset de la section Téroumah, l’auteur de Déguel HaMoussar, Rabbi Guerchon Libmann, cite le Ba’al HaTourim, qui écrit: «L’Eternel parla au cœur des enfants d’Israël, parce que l’offrande qu’ils Lui faisaient, leur faisait perdre de l’argent.» Le Yalkout Chimoni (1:363) enseigne: «Rabbi Avahou dit: «La construction du sanctuaire honore vraiment Israël, et expie leur péché.» Qu’arrivera-t il si on les dépouille de leur argent? N’est-il pas vrai que les enfants d’Israël n’étaient que des esclaves et servantes des Egyptiens, et que le Saint, béni soit-Il, les fit sortir en accomplissant des miracles en leur faveur? N’a-t-Il pas fendu la Mer pour eux? Ne les a-t-Il pas enrichis d’un butin abondant? Ne leur a-t-Il pas donné la Torah et fait descendre la manne? Ils étaient donc de toute évidence prêts à offrir généreusement des dons pour la construction du sanctuaire, manifestant de la sorte leur gratitude à Son égard. C’est avec la plus grande joie qu’ils devaient s’apprêter à le faire. Pourquoi devait-Il parler à leur cœur?»

Citant le Midrach (Yalkout Chimoni, Téroumah 363), Rabbi Yoël de Satmar explique que le terme li dénote toujours une idée de constance, de permanence. Il pose alors la question: «ces offrandes étaient destinées à la construction du sanctuaire et du Temple, or ils ont été détruits! Qu’en est-il alors de cette notion d’éternité? On peut aussi se demander pourquoi le verset stipule: «Vous la recevrez pour moi de tout homme qui le fera de bon cœur», et non «des enfants d’Israël qui le feront de bon cœur.» Eprouvant des difficultés à façonner le candélabre qui devait être fait tout d’une pièce, Moïse s’adressa à Dieu qui lui montra un candélabre en feu, qui finalement se façonna tout seul (Tan’houma, Béha’alotékha 3). Pourquoi n’éprouva-t-il pas de difficultés pour le façonnement des deux chérubins d’or qui devaient également être faits d’une pièce (cf. Exode 25:18). Les chérubins ne comprenaient certainement pas moins de secrets que le candélabre, et ils ont été l’objet de nombreux miracles.

C’est que Dieu voulait montrer aux enfants d’Israël que tout l’argent et l’or du monde Lui appartiennent (‘Hagaï 2:8); certes, le monde entier est rempli de Sa gloire, mais Lui qui sonde les curs sait que le mauvais penchant est particulièrement vigoureux dans le domaine financier. «Car haDaM, le sang, c’est l’âme» (Deutéronome 12:23). DaMim: l’argent, fait aussi partie de l’âme de l’homme, pourrait-on dire. On a beau être généreux, dépensier, l’argent constitue une grande épreuve en particulier chez les Tsadikim (Sotah 12a). Les gens pieux et intègres éprouvent de grandes difficultés à se débarrasser de toute trace de kélipah dans les dépenses qu’ils font pour accomplir des mitsvoth... Il faut une grande foi en Dieu pour déconsidérer totalement l’argent, qui en fin de compte, permet à l’homme de subsister. Les enfants d’Israël n’avaient rien à dépenser dans le désert. La manne leur descendait gratuitement du ciel. Il n’en demeure pas moins que Dieu dut parler à leur cœur pour les faire participer financièrement à la construction du sanctuaire, car le mauvais penchant vise à souiller toute mitsvah qui implique une dépense d’argent. Mon maître très vénéré, qui m’a inculqué les bases mêmes de la Torah et m’a enrichi spirituellement pendant des années, est venu une fois solliciter un don en faveur de la Yéchivah où j’ai étudié, et grâce à laquelle j’ai accédé à ce que je suis aujourd’hui, Dieu merci. Il va sans dire que j’ai été extrêmement content de le revoir, mais je dois avouer que ce n’est pas sans une certaine hésitation que je lui ai donné une somme d’argent pour subvenir aux besoins de sa Yéchivah. Car, lorsqu’il s’agit de dépenses, on ne se rappelle pas son passé, fût-il glorieux. On pense plutôt à sa poche et à sa situation financière actuelle. Mon Rav comprit tous mes sentiments, et estimant qu’il avait mal agi à mon égard, commença à parler à mon cœur. La discussion porta essentiellement sur les jours heureux où j’avais été étudiant de Yéchivah. Le cœur joyeux, j’ai alors doublé la somme d’argent à laquelle il s’attendait.

Le verset mentionne donc véyik’hou li, et non véyitnou li, car Dieu promet aux enfants d’Israël que s’ils font leur don en Son Nom, Il le considérera comme un prêt (et non un don) qu’Il leur rendra du Ciel, comme il est écrit: «Vous recevrez mon offrande» par le biais du sanctuaire, le chéfa’ (l’abondance) descendra sur eux et renforcera leur culte divin.

C’est essentiellement par l’union et l’amour d’autrui qu’on arrive à observer la Torah. «Tu aimeras ton prochain comme toi-même» nous ordonne l’Eternel. C’est un grand principe de la Torah. Dieu ne cherchait en fin de compte que le bien des enfants d’Israël. Le sanctuaire, qu’ils devaient ériger, était destiné à renforcer leur culte divin. Il n’en demeure pas moins que pour les faire participer à cette mitsvah, Il dut parler à leur cœur. Conduisons-nous à notre tour comme Lui: en sollicitant un prêt ou un don de notre prochain, parlons poliment à son cœur, avec le maximum de tact.

Celui qui s’engage dans l’étude de la Torah, c’est comme s’il «donnait» à Dieu quelque chose, qui n’a dans son monde que les quatre coudées de la halakhah (la loi) (Bérakhoth 8a; Ba’al HaTourim, id.). L’étude de la Torah ne doit viser que le Nom de Dieu. Le verset stipule donc MéETh (Kol ich), «de tout homme» parce que les offrandes doivent revêtir l’aspect de Torath EMeTh (qui a les mêmes lettres que MéETh).

Le sanctuaire et le Temple ont certes été détruits, mais l’aspect du sanctuaire fait allusion à l’homme qui consacre sa vie à servir Dieu. Dans le terme michkan, on retrouve les lettres du terme nimchakh: l’homme doit être attiré par Dieu. Il doit Le servir de tous les membres de son corps. Si un membre d’une brebis destinée à être sacrifiée tombe de l’autel, on l’y remet. De même l’homme qui a péché par un de ses membres, doit se repentir, le corriger, le remettre sur l’autel et le «sacrifier» en l’honneur de l’Eternel.

Dieu a besoin également de parler au cœur de celui qui, en dépit de toutes les séductions du monde, choisit de s’engager assidûment dans l’étude de la Torah, et fait une offrande au Nom de Dieu. «Prends téroumati (offrande, la Torah), lui dit l’Eternel. Tu auras témourati (son équivalent, Je te rémunérerai).» En d’autre termes, toi qui, au lieu d’aller travailler et gagner de l’argent, étudies Ma Torah, tu seras doublement récompensé.

Abstenons-nous donc de léser celui qui étudie la Torah au détriment de ses revenus. Soyons de tout cœur avec lui. C’est pourquoi le verset stipule: «de tout homme qui fera une offrande de bon cœur» et ne s’adresse pas collectivement aux enfants d’Israël (car c’est une mitsvah où il faut se singulariser).

Le Talmud (Chéqualim 1:1) enseigne que le premier Adar, on proclame la collecte des Chéqualim. Pourquoi ne passerait-on pas d’une ville à l’autre, d’un quartier à l’autre, pour recueillir les fonds nécessaires. C’est qu’il faut d’abord parler au cœur des gens avant de venir demander leur contribution. Chéqualim a les mêmes lettres que michkali, en d’autres termes, la charité fait tendre la balance (de Dieu) du côté des mérites de l’homme, car il a maîtrisé sa cupidité, il a donné de son argent à une bonne oeuvre. Les chéqualim font également allusion à l’union et l’amour du prochain, car le demi-chéquel offert par l’un, joint au demi-chéquel offert par l’autre, forme une pièce entière. A Pourim, nous sommes tenus de nous envoyer réciproquement des cadeaux (Esther 9:19). Pourquoi ne devrions nous pas plutôt les donner à nos amis et connaissances? C’est qu’à notre humble avis, la charité est certes très précieuse aux yeux de l’Eternel, mais il vaut beaucoup mieux envoyer de son propre gré de la tsédakah à quelqu’un qu’on connaît (ou qu’on ne connaît pas), sans qu’il nous identifie, ou sans qu’il nous le demande: c’est vraiment la charité par excellence. Qu’appelle-t-on ich (un homme)? Celui qui partage la douleur de son prochain et l’aide sans qu’il le lui demande expressément. Ce geste qu’on fait au mois d’Adar, devrait nous inciter à nous conduire de la sorte tout au long de l’année.

«Quand commence Adar, on doit redoubler de joie» (Ta’anith 26b): quand celui qui se sent prêt à faire des dépenses dans le domaine de la sainteté entend parler des chéqualim (le début du mois d’Adar), il se sent plein de joie.

 

«Qu’ils M’apportent une offrande pour Moi»... mais pas dans le but de recevoir une récompense
TABLE DE MATIERE
L’âme de Moïse se propage en tout Juif

 

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