Son cœur s’enorgueillit dans les voies de l’Eternel... (la Torah à travers l’humilité)

Sur le verset : « Dis aux cohanim et tu leur diras » (Lévitique 21, 1), la Guemara explique : « C’est pour mettre en garde les grands à propos des petits » (Yébamoth 114a). Le verset vient prévenir les grands, comme les fils d’Aaron et leurs semblables, d’avoir à ressembler à leurs ancêtres et à continuer dans leurs traces, mais avec une grande humilité comme Aaron, dans l’esprit de la michnah : « Fais partie des disciples d’Aaron » (Avoth 1, 12). Même s’ils ont déjà atteint des sommets spirituels et ne cessent de s’élever dans le service de Dieu, ils doivent demeurer petits et humbles à leurs propres yeux, faute de quoi ils se rendraient impurs au contact d’un mort dans leur peuple, ce qui n’est permis que pour les proches, son père et sa mère (Lévitique 21, 2), ce qui signifie que lorsqu’il s’agit de sanctifier le Nom de Dieu, qui est notre père dans la Torah et la spiritualité, on a le droit de se sentir supérieur, dans l’esprit du verset : « Son cœur s’enorgueillit dans les voies de l’Eternel » (II Chroniques 17, 6). C’est uniquement dans ce contexte qu’il est permis à l’homme de s’enorgueillir.

Non seulement cela, mais ce genre d’orgueil est un devoir. Quand il s’agit de Dieu, qui est notre père et notre mère, et de l’honneur de Sa Torah, un petit peu de fierté est légitime, comme l’affirme la Guemara : « Il est permis à un talmid ‘hakham d’avoir un huitième de huitième d’orgueil » (Sotah 5a), car s’il était trop petit à ses propres yeux, il finirait par en arriver au désespoir. C’est pourquoi la Torah lui permet et même lui recommande un sentiment de fierté. Il deviendra ainsi un homme saint et pur, car quand il se tue pour la Torah, qui est la sagesse, elle résidera en lui, ainsi qu’il est écrit : « La sagesse est avec les humbles » (Proverbes 11, 2), ou encore : « Dis à la sagesse : tu es ma sœur » (Ibid. 7, 3). Pour l’amour de cette Torah, on a le droit de s’enorgueillir, cette fierté même étant une élévation dans le service de Dieu.

C’est cela le lien entre la parachat Kedochim, la parachat Emor et la parachat A’harei Mot. L’homme doit se tuer pour les paroles de Torah, comme les Sages l’expliquent sur le verset : «  Voici la règle (litt. : la Torah), un homme qui meurt dans la tente » (Nombres 19, 14) (Bérakhoth 63b, Chabath 83b, Zohar II, 158b), c’est cela : A’harei Mot, « après la mort », et ensuite seulement il peut arriver à la sainteté (Kedochim) et sentir son cœur se gonfler dans l’amour pour Dieu (Emor). Si l’on inversait l’ordre en commençant par la fierté, on risquerait de tomber dans l’erreur en s’imaginant que c’est pour le Nom de Dieu qu’on se gonfle, alors qu’en réalité c’est pour soi-même, on serait donc impur au milieu de son peuple, car on ne marcherait pas dans les voies des pères qui se sont enorgueillis uniquement pour Dieu. C’est cela « Dis et tu diras », mettre en garde les grands à propos des petits, qu’ils regardent leurs ancêtres pour rester petits, et ne s’enorgueillissent que pour le Nom de l’Eternel.

Dans la suite du verset, il est écrit : « Dis aux cohanim fils d’Aaron... qu’ils ne se rendent pas impurs par le contact d’un cadavre ». C’est une allusion aux mitsvoth, qui s’appellent les « enfants » du juste (lequel est ici symbolisé par Aaron), car pour observer les mitsvoth correctement, il faut le faire avec humilité et effacement, comme un serviteur qui accomplit les ordres de son maître. Le juste doit prendre garde à ne pas trop s’effacer mais à garder le sens de la mesure, pour ne pas en arriver dans son service à des exagérations qui provoqueraient une profanation du Nom de Dieu, ce qui le rendrait impur dans son peuple. Il doit se rendre impur pour son père et sa mère, à savoir pour le Nom de Dieu, avec l’équilibre qui convient.

Nous allons citer à ce propos ce qu’écrit Noam Elimélekh sur ce verset :

« Pour comprendre la répétition « Dis et tu diras », il faut d’abord expliquer le verset : « Parle à Aaron et à ses fils, qu’ils se mettent à l’écart des saintetés des benei Israël » (Lévitique 22, 2). En effet, il y a deux sortes de justes, ceux qui tiennent leur probité de leurs pères, qui étaient saints et craignaient Dieu, or on sait que la Torah revient dans son auberge (Baba Metsia 85a), et ceux qu’on peut appeler « nezirim » (« séparés ») parce qu’ils se sont mis à l’écart de leur propre initiative, bien qu’étant issus de parents peu compréhensifs. Ceux-là ne retombent pas si facilement de leur niveau de sainteté, car n’ayant personne sur qui s’appuyer, ils s’abaissent en leur for intérieur et se surveillent constamment avec sévérité. Quant à ceux qui tiennent leur sainteté de leurs pères, ils sont remplis de Torah et de mitsvoth par le mérite de leurs ancêtres qui les aide (Avoth 2, 2), et cela peut parfois les mener à une tentation de grandeur qui les fera rapidement décliner. » C’est pourquoi la Torah met en garde, « Dis et tu diras aux enfants d’Aaron », à ces justes, qu’ils doivent continuer à travailler par eux-mêmes, sans prendre en considération ce qui leur vient de leurs ancêtres, qu’ils se séparent et deviennent saints par leurs propre forces, sans quoi ils en arriveront à l’orgueil, or : « Quiconque s’enorgueillit est en horreur à l’Eternel » (Proverbes 16, 5). C’est cela « Dis et tu diras », une allusion aux deux niveaux, d’une part ne pas regarder le mérite des pères, et d’autre part s’élever par ses propres moyens. Alors ils ne se rendront pas impurs au contact d’un mort, et ainsi ils n’arriveront pas à l’orgueil et à la profanation du Nom de Dieu ». Je crois avoir donné une explication semblable.

On peut donc en conclure que le juste doit faire très attention, particulièrement celui qui possède le mérite de ses pères, car maintenant le mérite des Patriarches s’est épuisé (Chabath 55a, Yérouchalmi Sanhédrin ch. 10, 1), et il doit agir par lui-même et s’élever de lui-même, sans regarder le passé de sa famille, pour ne pas tomber dans l’orgueil et ne pas se rendre impur dans son peuple.

On peut aussi expliquer le sujet d’une autre façon. Un talmid ‘hakham s’appelle un ben Torah, « fils de la Torah », et il n’y a pas de plus grand mérite des pères que d’être fils de la Torah. Par conséquent il doit d’autant plus se méfier de l’orgueil, et ne pas utiliser la Torah à ses propres fins (Avoth 4, 7), mais garder présents à l’esprit les propos de Rabbi (Ibid. 2, 1) : « Quel est le droit chemin que l’homme doit emprunter, etc. ». De quelle façon ? En mettant en garde les grands à propos des petits, en leur disant de rester petits et de ne pas s’enorgueillir dans la Torah, sans quoi ils se rendraient impurs dans leur peuple. Qu’ils agissent uniquement par amour du Ciel, ainsi qu’il est écrit : « Que tous tes actes soient par amour du Ciel » (Ibid. 2, 17). Il leur est permis de se rendre impur pour leur père et leur mère, ce qui rejoint le concept « Sois extrêmement humble » (Ibid. 4, 4), et renvoie à la Torah, qui est le père et la mère de ce « ben Torah » [Note du rédacteur : le mot meod (extrêmement) a la même valeur numérique que av em (père, mère)].

J’ai trouvé l’idée suivante dans Yssma’h Moché sur notre parachah : Pourquoi est-il question des fils d’Aaron ? Et que signifie : « et tu diras » ? C’est pour mettre en garde les cohanim contre l’impureté contractée au contact d’un mort. Pourquoi cela ? Il en est question dans le Zohar (I, 168a) et aussi dans la Guemara (Baba Metsia 114a), qui demande pourquoi les tombes des non-juifs ne rendent pas impur. L’explication est qu’au moment où un israélite meurt et que son âme sainte s’en va, il reste des étincelles de sainteté et des traces de sainteté dans le corps, et c’est là que résident les forces de l’impureté pour s’en nourrir, idée évoquée dans le verset « Les méchants rôdent aux alentours » (Psaumes 12, 9). C’est pourquoi ce corps rend impur : l’impureté s’y accroche, et un homme vivant qui le touche devient impur. Ce qui n’est pas le cas pour les non-juifs, qui n’ont aucune sainteté, et dont les cadavres sont semblables à ceux des animaux, idée évoquée par le verset « leur lubricité égale celle des chevaux » (Ezéchiel 23, 10) ou l’expression « peuple semblable à un âne » (Baba Kama 15a, Vayikra Rabah 20, 2). C’est pourquoi ils ne communiquent aucune impureté.

Mais pendant sa vie, un juif ne rend pas impur, car les forces d’impureté ont peur de s’approcher de lui. Elles ne s’approchent de ce qui reste de sa sainteté qu’après sa mort, et à ce moment-là le rendent impur, si bien qu’un vivant qui s’approche et le touche devient impur, et ces forces le font tomber dans la faute, ainsi qu’il est dit : « Le Satan, c’est le mauvais penchant, c’est l’ange de la mort » (Baba Batra 16a). Il incite ce vivant au péché, cherchant à le détourner et à s’emparer de son âme. Si les cohanim sont rendus impurs par le contact d’un mort, c’est parce qu’au moment de la faute du Veau d’Or, certes Aaron n’a pas péché en pensée, puisqu’il a dit : « C’est une fête pour l’Eternel demain » (Exode 32, 5), et non : « c’est une fête pour le Veau », il a péché uniquement en acte, mais le Satan ne connaît pas les pensées, il sait seulement qu’Aaron a fauté. Par conséquent, quand un cohen s’approche d’un mort, à l’endroit où se sont rassemblées les forces de l’impureté, il le fera tomber dans l’impureté et le péché pour éveiller le souvenir de la faute du Veau d’Or. Ce processus est un décret du roi du monde, ainsi qu’il est écrit : « Vous avez accepté ma royauté, acceptez mes décrets » (Yalkout Chimoni A’harei 590).

Malgré tout, on comprend toujours mal pourquoi après la mort d’un juste il reste une trace de sainteté à laquelle vont aller s’accrocher les forces de l’impureté. Il aurait été préférable que même ce petit reste disparaisse complètement, alors le mort ne rendrait pas impur celui qui le toucherait, et à plus forte raison un cohen ne serait pas rendu impur ! De plus, les justes dans leur mort sont appelés vivants (Bérakhoth 18a), ils ne devraient donc pas rendre impur plus que pendant leur vie !

Il est dit au nom de Rabbi Chimon : « Celui qui est en chemin et interrompt son étude pour dire : comme cet arbre est beau, comme ce bosquet est beau, celui-ci met son âme en danger » (Avoth 3, 7). On voit donc que tant que l’homme étudie, il s’appelle « vivant », car il est dit « et il en vivra » (Lévitique 18, 5). Toute la vitalité de l’homme lui vient de l’étude de la Torah, et tout ce qui le fait vivre, que ce soit la nourriture, le sommeil, la marche ou autre, doit venir uniquement de la Torah, car il est écrit : « Connais-le dans toutes tes voies » (Proverbes 3, 6), et la Torah s’appelle « vie » (Avoth Derabbi Nathan 34, 10). On doit donc toujours être rattaché à son Créateur par l’étude de la Torah, auquel cas on relèvera du principe selon lequel « un triple lien ne se rompt pas facilement » (Ecclésiaste 4, 12). Ce triple lien représente l’homme, la Torah et le Saint béni soit-Il, car tous trois ne font qu’un (Zohar III, 218b).

Mais s’il rompt ce lien (de Torah) qui le rattache au Créateur, s’il veut vivre en ce monde au gré de ses désirs, dans les plaisirs et les vanités, il met son âme en danger et risque de mourir à chaque instant. Or on sait qu’au moment où l’homme agonise et qu’il est sur le point de mourir, le cohen doit s’éloigner de lui, la plupart des mourants étant appelés à mourir effectivement (Guittin 28a), et l’ange de la mort attend déjà, ainsi que la kelipah. L’homme qui interrompt son étude ressemble à cet agonisant et peut être considéré comme mort, alors la kelipah s’accroche à lui et rend impur tout l’entourage. Il est interdit de regarder son visage, car c’est un impie et on ne doit pas regarder un homme mauvais (Méguilah 28a), qui connaît son maître et se rebelle contre Lui délibérément (Torath Cohanim 26, 18).

C’est pourquoi il est écrit « Dis et tu diras », pour mettre en garde les grands à propos des petits. Cela signifie que tout ben Torah doit être fermement relié à D ; s’il est grand par des choses graves, s’il est petit par des choses plus légères, et même en ce qui concerne la mitsvah la plus légère, il ne doit pas suivre ses instincts. Une telle attitude briserait sa vitalité, car elle équivaudrait à se rendre impur au contact d’un mort, et il attirerait le danger sur lui-même. Il doit simplement prêter la même attention à la plus légère mitsvah qu’à la plus grave (Avoth 2, 1), alors la kelipah ne s’accrochera pas à lui. Dans le cas contraire, il sera déjà appelé mort de son vivant, à l’instar des méchants (Bérakhoth 18b, Zohar II, 106b), et rendrait impurs ceux qui sont sous le même toit que lui (Nombres 19, 14). C’est le lien entre la parachat Kedochim, la parachat Emor et la parachat A’harei Mot qui les précède. L’homme doit être rattaché à la Torah, et non se conduire comme bon lui semble. Alors il relèvera de « Dis et tu diras », il ne rendra pas impur même après la mort, et il se tuera pour la Torah, alors il y aura en lui de la sainteté même après sa mort, car la kelipah le fuira et il sera appelé saint (Isaïe 4, 3).

D’après ce qui a été dit jusqu’à présent, nous comprendrons beaucoup mieux les paroles du Zohar selon lesquelles après la mort, il reste en l’homme une trace sainte des mitsvoth qu’il a faites dans sa vie. Comme on le sait, le corps est un instrument de mitsvah qui s’use et doit être enterré, de la même façon qu’un sac des tefilin ou un manteau de rouleau de la Torah usés, qu’on doit mettre dans une guenizah parce qu’ils ont servi à une mitsvah (Sanhédrin 48b). Ainsi tout homme dont les mains ont mis les tefilin, qui les a placés sur sa tête, dont les jambes ont couru pour étudier la Torah et dont la bouche a parlé de Torah, a fait de son corps entier un instrument de mitsvah et de sainteté. Ce corps est en lui-même la trace des mitsvoth qu’il a faites dans sa vie, et il est impossible que cette trace disparaisse, sinon après la mort le corps lui-même devrait disparaître complètement, ce qui n’est pas le cas ! Par conséquent le corps est saint, la preuve en étant que l’impureté s’attache à lui. On voit donc combien l’homme, et plus encore le juste, est saint dans sa vie, et comme on le sait les justes ne rendent pas impurs dans leur tombe (Zohar I, 168a), comme en témoigne l’histoire du prophète Elie et de Rava bar Aboua (Baba Metsia 114 a-b) qui se sont rencontrés au cimetière, et Rava bar Avoua a demandé à Eliahou comment il pouvait se trouver là puisqu’il était cohen. On peut se référer à ce passage, aux Tossafoth (114a, passage qui commence par chéissadrou), et aussi au Midrach (Yalkout Chimoni Proverbes 944), pour s’assurer que les justes ne rendent pas impur. Simplement, nous ne savons pas qui est parfaitement juste au point de ne pas rendre impur, c’est pourquoi dans le doute on ne touche à aucun corps. Mais chez le juste, l’impureté n’a absolument aucune prise, car il reste en lui des traces de sainteté.

Cependant, si on trouve un homme auquel l’impureté s’attache, c’est un signe qu’il a détérioré les endroits où la sainteté laisse des traces : peut-être n’a-t-il pas accompli la mitsvah de façon tout à fait désintéressée, ce qui a abîmé la trace, ou bien la kelipah s’est accrochée à un endroit où l’âme se trouvait afin de se nourrir de la trace qui reste, alors que chez le juste parfait cette kelipah ne peut pas rentrer du tout, et encore moins se nourrir de lui. Quand on constate que la kelipah veut se nourrir de quelqu’un, c’est un signe que cet homme a malheureusement fait du mal dans sa vie, car s’il y a une kelipah, cela signifie qu’il y a une trace de sainteté, par conséquent il est dommage qu’il n’ait pas profité de cette sainteté pour sanctifier vraiment tout son corps.

Il est écrit à propos d’Adam : « Il insuffla dans ses narines une âme de vie » (Genèse 2, 7). Ce verset est valable pour tous les siècles, car ce souffle donné au premier homme se retrouve chez chaque homme d’Israël pour former une âme de vie, en sainteté et en pureté, car l’homme est l’œuvre des mains du Saint béni soit-Il (Béréchith Rabah 24, 5), par conséquent même après sa mort, après la sortie de son âme, tout le corps reste saint par la force de ce souffle venu du Saint béni soit-Il. C’est pourquoi les Sages ont dit : « Les lèvres des justes remuent dans la tombe » (Yébamoth 97a, Yérouchalmi Bérakhoth 2, 1), ces lèvres qui ont appris la Torah restent saintes même après leur disparition, et la kelipah n’a aucune prise ni aucun moyen de se nourrir d’un corps aussi saint. Ce n’est pas pour rien que la trace de sainteté demeure dans la tombe et que les lèvres remuent. Par conséquent, quand les gens viennent prier sur les tombes des tsaddikim, la sainteté qui reste dans leur corps à cause de toutes les mitsvoth accomplies pendant leur vie constitue un mérite pour l’homme vivant. C’est cela « mettre en garde les grands à propos des petits », mettre en garde les justes à propos des petits, afin qu’ils intercèdent et prient pour eux, qu’il reste en eux une trace, et qu’ils ne se rendent pas impurs dans leur peuple, car ils doivent veiller sur l’âme de vie que le Saint béni soit-Il leur a insufflée. Alors ils ne rendront pas impurs, comme dans l’histoire du prophète Elie évoquée ci-dessus.

On peut aussi expliquer que le Saint béni soit-Il a dit à Moïse de prévenir les benei Israël que lorsqu’ils verront des « grands », à savoir la grandeur de Dieu, il est évident qu’ils doivent se faire « petits » et s’abaisser devant Lui. Le Rambam a écrit que quand l’homme perçoit la grandeur du Créateur à travers l’univers qu’Il a créé, il en vient nécessairement à se sentir petit et à s’abaisser lui-même (Hilkhoth Yessodoth Hatorah ch. 2, et autres). Alors son cœur se remplit de fierté dans les voies de l’Eternel et il s’élève, sans rester mesquin comme il était auparavant. C’est une interpellation qui s’adresse à tous de prendre conscience de la grandeur du Créateur, et d’atteindre la grandeur des êtres spirituels, afin de rester saint même après la mort et de ne pas se rendre impur dans son peuple. C’est une mise en garde non seulement pour les grands mais aussi pour les petits, car tous peuvent s’élever, dans l’esprit de ce qui est écrit : « Afin de ne pas repousser à jamais celui qui est banni de Sa présence » (II Samuel 14, 14).

Tout ce que nous avons dit jusqu’à présent permet de répondre aux questions que pose le Admor de Satmar sur notre parachah. Sur le verset : « Dis aux cohanim et tu leur diras » (Lévitique 21, 1), le Zohar (III, 88b) écrit qu’il faut leur dire dans un murmure, car de même que le service des cohanim se passe en murmurant, ce qu’on leur dit doit être un murmure. Et le Rabbi de Satmar demande : nous savons que tout se passait à haute voix, comme il est écrit à propos du mont Garizim et du mont Hébal : « Les lévites prendront la parole et diront à haute voix » (Deutéronome 27, 14). Pourquoi donc ici faut-il murmurer ? Quel secret veut-on cacher ? D’ailleurs on traite des lois concernant l’impureté chez les cohanim, ces lois ne sont pas un secret et n’ont pas à être murmurées, et Dieu parle à haute voix, ainsi qu’il est écrit : « Je n’ai pas parlé dans le secret » (Isaïe 45, 19).

Le Rabbi de Satmar pose encore une autre question. Sur ce verset, les Sages ont expliqué qu’il est écrit : « Les paroles de Dieu sont des paroles pures » (Psaumes 12, 7), car les paroles d’un roi humain ne sont ni pures ni sûres, alors que celles de Dieu sont pures. Pourquoi ? Parce qu’il est écrit : « L’Eternel Dieu est vérité, Lui seul est un Dieu vivant et un roi éternel » (Jérémie 10, 10), c’est pourquoi on peut faire confiance à Ses paroles (Vayikra Rabah 26, 1). On ne comprend pas ce que vient faire ici cette explication, alors que notre passage traite des lois de l’impureté engendrée par un mort chez les cohanim. Pourquoi est-ce à ce propos qu’il faut dire que Dieu est éternel ? Toute la Torah n’est-elle pas éternelle ?

Ces deux questions trouvent leur réponse dans notre développement précédent, car ici la Torah enjoint à tout le monde de se conduire avec humilité et effacement, sans s’enorgueillir et sans compter sur le mérite des pères. Ainsi tous les actes seront accomplis dans la sainteté, car seules les paroles de l’homme humble sont entendues, et en toute discrétion, comme dans le verset : «  Les paroles des sages se font entendre dans la douceur » (Ecclésiaste 9, 17). C’est pourquoi le Saint béni soit-Il a demandé à ce qu’ici tout soit murmuré, doucement et humblement, puisque c’est ici qu’on prévient les cohanim, c’est-à-dire les benei Torah, d’avoir à se comporter doucement et humblement, auquel cas ils feront attention aux petits comme aux grands, aux mitsvoth légères comme aux plus graves, et ils ne se rendront pas impurs dans leur peuple. C’est uniquement pour leur père et leur mère, à savoir quand il s’agit du service de Dieu, qu’ils pourront se rendre impur et laisser leur cœur se gonfler dans les voies de Dieu.

Par conséquent, on comprend parfaitement le thème des « paroles pures » : le Saint béni soit-Il donne aux benei Israël le conseil de parler purement comme Lui, ce qui les rendra semblables à Lui, au point que s’Il édicte un décret, lui, le juste, pourra l’annuler (Moed Katan 16b, Tan'houma Vayéra 19), par la force de la pureté de son langage et de son investissement dans la Torah de l’Eternel. Sans les conseils de Dieu, même si quelqu’un est roi, ses paroles ne sont pas pures et pas du tout fiables, car il est appelé à dormir sans se relever. Mais jusque dans sa mort, le juste reste comme vivant, et le Saint béni soit-Il continue à respecter ses actes et ses paroles, si bien que toutes les lois qui sortent de la bouche du juste pour rendre quelque chose pur ou impur restent « des paroles pures », parce qu’il les a prononcées en murmurant, humblement et sans orgueil, et que Dieu donne de la force à ses paroles, jusqu’à la venue du Rédempteur, rapidement et de nos jours, Amen.

Tout ceci s’applique uniquement à celui qui étudie la Torah. Le Alcheikh demande, à propos de « il ne se rendra pas impur dans son peuple», pourquoi il n’est pas écrit explicitement « par le contact d’un mort » ? Il cite le Midrach suivant : : « Il ne se rendra pas impur dans son peuple », à savoir tant que le mort est dans son peuple, à l’exception du mort que personne ne réclame, et pour lequel on se rend impur (Torath Cohanim 21, 4 et Rachi). Tout se tient, car si c’est un mort que personne ne réclame, même si le cohen est occupé à faire un mitsvah ou à étudier la Torah, il a le droit de se rendre impur pour lui, dans l’esprit du verset « Son cœur s’enorgueillit dans les voies de l’Eternel ». Mais s’il ne s’occupe pas de Torah, même s’il n’est pas vraiment mort, il ne doit pas se rendre impur dans son peuple « pour une âme » : il n’est pas comparable à une âme, car comme il négligeait la Torah et les mitsvoth, l’âme lui a été enlevée. C’est uniquement dans le cas contraire qu’il s’appelle vivant et que ses paroles sont pures.

Tout ce qui a été dit jusqu’à présent nous permettra de répondre à une question supplémentaire du Admor de Satmar, qui demande pourquoi c’est justement dans cette parachah de l’impureté des cohanim que la Torah a mis en garde les grands à propos des petits, alors que dans toutes les mitsvoth les grands doivent mettre en garde les petits. Il s’interroge également sur le midrach selon lequel aux anges qui n’ont pas de mauvais penchant, il suffit de dire les choses une fois, ainsi qu’il est écrit : « Tel est l’arrêt prononcé par la volonté des anges et la résolution [au singulier] décrétée par les Saints » (Daniel 4, 14) ; alors qu’en ce qui concerne les êtres d’en bas qui ont un mauvais penchant, on espère que deux injonctions suffiront, ainsi qu’il est écrit : « Dis et tu diras » (Vayikra Rabah 26, 5). La question est la suivante : s’il en est ainsi, il faudrait répéter toutes les mitsvoth. Pourquoi ne répète-t-on que cette mitsvah sur l’impureté ?

D’après ce qui a été dit ci-dessus, on comprend parfaitement qu’ici il est question de la base de toute la Torah, à savoir l’humilité et l’abaissement. Etudier la Torah par orgueil rendrait impur, or on n’obtient l’aide du Ciel que par la Torah dont les paroles sont pures, sans elle on est complètement mort, on rend impur et on n’a aucune trace de sainteté. C’est pourquoi c’est justement ici, dans ce passage qui traite de la base et du but de la Torah, qu’elle met en garde les grands à propos des petits, et ici que l’enseignement est repris deux fois, avec des paroles pures, car c’est ici qu’on a l’essentiel de la Torah. C’est une idée à méditer, car elle est profonde.

 

L’orgueil est la source de toutes les fautes
Table de matière
L’amour du prochain

 

Hevrat Pinto • 32, rue du Plateau 75019 Paris - FRANCE • Tél. : +331 42 08 25 40 • Fax : +331 42 06 00 33 • © 2015 • Webmaster : Hanania Soussan