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Rabbi Ben-Tsion Alfess • Auteur De « Ma’ssei Alfess »

Quand je revois les scènes de mon enfance, l’image de Rabbi Ben-Tsion Alfess est comme vivante devant moi : un homme âgé, voûté, les yeux baissés vers la terre et un bonheur éternel illuminant un visage couronné d’une longue barbe blanche.

Je m’étais toujours demandé qui était l’homme qui avait écrit de belles explications sur le sidour, ainsi que sur les prières et les poèmes qu’on récite pendant les fêtes, celui qui avait traduit tout cela dans un yiddish populaire, en lui donnant l’aspect extérieur de l’hébreu, car il ponctuait le yiddish avec les voyelles de l’hébreu. Or j’ai eu la chance de le rencontrer face à face, voici dans quelles circonstances :

Par une chaude après-midi, la porte de notre maison s’ouvrit et un vieil homme au visage rayonnant comme le soleil entra dans la pièce. Nous vivions alors à Peta’h Tikva, la plus grande agglomération d’Erets-Israël. Il tenait à la main une boîte de tsedakah. Il dit : « Je ramasse de l’argent pour le mikvé de la ville de Peta’h Tikva. » Nous le fîmes asseoir pour se reposer un peu, et lui présentâmes un verre de jus d’orange. Il faisait très chaud, et il avait alors déjà près de quatre-vingt cinq ans. Nous lui demandâmes comment il s’appelait, et il répondit : « Je m’appelle Ben-Tsion Alfess ». Je me souviens de notre stupéfaction d’avoir mérité de voir l’auteur de « Ma’assei Alfess ». Ma mère en particulier, Dieu ait son âme, était dans une joie extraordinaire. Son regard brillait d’excitation, elle n’en croyait pas ses yeux. Elle s’exclama : « Toute ma vie, j’ai prié dans le sidour de Ma’assei Alfess. J’ai grandi avec les merveilleuses histoires du sidour. Combien de larmes j’ai versées en lisant les poèmes de supplication, dans le sidour et dans le ma’hzor ! »

De temps en temps, j’écoutais les cours qu’il donnait sur le parvis de la grande synagogue de Peta’h Tikva. Les paroles qui sortaient de son cœur chaleureux éveillaient les cœurs à l’accomplissement de la Torah et au raffermissement de la foi.

Je me souviens d’une histoire qu’il avait racontée. Un jour, Rabbi Ben-Tsion rencontra des missionnaires qui se mirent à discuter avec lui. Alors il leur dit : « J’ai l’habitude de raconter des histoires, c’est pourquoi je vais vous raconter quelque chose qui est arrivé. Un jour, dans une fête de riches propriétaires, après avoir bu pas mal, ils voulurent organiser un jeu. Chacun mettrait dix roubles sur la table, et celui qui dirait un mensonge dont tout le monde serait d’accord pour dire que c’est un mensonge aurait gagné l’argent. C’est ce qu’ils firent. Chacun essaya d’inventer des mensonges, mais ils ne réussirent pas à prouver que c’était totalement faux. Ils disaient : « C’est peut-être vrai ! Aujourd’hui tout est possible. » Un des propriétaires dit : « Je suis sûr que le juif qui habite dans mon village pourra inventer un mensonge tel que tout le monde sera d’accord dessus. » On fit venir le juif. Le propriétaire lui dit : « Ecoute, juif, si tu peux dire un mensonge tel que tout le monde reconnaîtra que c’est une mensonge, tu auras tout l’argent qui se trouve sur la table. » Le juif réfléchit un moment et dit : « Votre chrétien est né d’un père et d’une mère comme tous les autres hommes. » Un profond silence s’installa dans la pièce. Et tout à coup tout le monde se réveilla et dit d’une seule voix : « C’est un mensonge ! C’est un mensonge ! » Le juif prit l’argent et rentra chez lui. Le lendemain, le propriétaire lui demanda : « Dis-moi, juif, comment as-tu imaginé un mensonge aussi énorme ? » Le juif répondit : « Mon père, dont l’âme est au Paradis, m’a dit : Mon fils, le meilleur des mensonges, c’est la vérité. »

Rabbi Ben-Tsion est né à Vilna, de Rabbi Yirmiyahou Akiva, le 1er Kislev 5611 (1851). Comme c’était l’habitude à l’époque, le jeune Ben-Tsion étudia chez un instituteur, et réussissait très bien.

A l’âge de quatorze ans, il se mit à étudier avec son père, mais il ne put continuer très longtemps, car celui-ci mourut alors qu’il n’avait que quinze ans. Alors il partit étudier à la yéchivah d’Eichichok.

Après son mariage, il continua à étudier au Kleuz du Gra à Vilna. Il y entendit la Torah de grands de la Torah, qui avaient connu le Gra de Vilna. Il se rapprocha en particulier du gendre de Rabbi Avraham, le frère du Gra.

En 5632 (1872), il décida d’aller s’installer en Erets-Israël. En arrivant aux portes de la vieille ville de Jérusalem, il déchira son vêtement et entra à l’intérieur des remparts. Il loua un appartement et fixa son lieu de prière et d’étude au Midrach Mena’hem Tsion, situé dans les ruines de la synagogue de Rabbi Yéhouda He’hassid. Pendant six mois, il étudia avec les enfants d’Israël sans rétribution. Il se proposa aussi pour aller vérifier les mezouzoth à l’entrée des maisons.

Rabbi Ben-Tsion essaya de trouver un travail qui puisse lui permettre de vivre, mais il n’y réussit pas et en fin de compte il fut obligé de revenir à Vilna. Le Rav de Jérusalem, Rabbi Chemouël Salant, le bénit avant son départ que Dieu l’aide à revenir à Jérusalem selon son désir.

A son retour à Vilna, il fut accepté comme correcteur d’épreuves principal de l’imprimerie « Ha’Hevra Metz ». Son travail consistait essentiellement à relire des livres saints. Un jour, il vit que les ouvriers de l’imprimerie préparaient à l’impression un livre écrit par un juif maskil, totalement athée. Cet ouvrage était rempli de moqueries et d’obscénités. Rabbi Ben-Tsion fut effrayé de ce qu’il voyait. Il se leva et quitta le lieu de son travail, en disant : « Je ne vendrai pas mon âme pour quelques morceaux de pain. »

Il commença immédiatement à chercher les moyens de lutter contre ce fléau, et de sauver les jeunes d’Israël, garçons et filles, de cette littérature laïque empoisonnée. Il se mit à écrire sous le titre « Ma’assei ALfess » des histoires qui le rendirent célèbre. Les jeunes d’Israël lisaient ses histoires, qui étaient remplies d’amour de Dieu et de beaux traits de caractère. Le ‘Hafets ‘Haïm écrivit que « ses écrits étaient utiles à la communauté ». Il publia également les livres HaYirah et Cha’arei Techouvah de Rabbeinou Yona de Gérone en traduction yiddish. Rabbi Sim’ha Zissel Ziv, le Saba de Kelem, lui sut gré de cette action opportune. Le Netsiv de Volojine lui décerna le titre de Rav Pealim, « celui qui fait beaucoup ». Au même moment, il commença aussi à donner des cours en public, pendant la semaine, le Chabath et les fêtes. Il éveillait les cœurs à l’observance de la Torah et des mitsvoth, et poussait son public à s’écarter des conseils des méchants, de la voie des pécheurs et des réunions de moqueurs. Il se préoccupait aussi des pauvres et des orphelins, afin qu’ils puissent étudier la Torah dans les écoles. Au fil des années, il fonda à Vilna un réseau de ‘hadarim pour les enfants pauvres, du nom de Torath ‘Hessed.

Mais surtout, il acquit le monde à venir par sa plume fertile, qui au fil des années rédigea soixante ouvrages. C’est à juste titre qu’on l’appelle « le pionnier de la littérature orthodoxe en yiddish ».

A l’âge de la vieillesse, en 5685 (1925), Rabbi Ben-Tsion repartit pour Erets-Israël. Les habitants de Peta’h Tivka l’invitèrent à être le directeur spirituel de la société Tiféret Bakhourim. Il resta à Peta’h Tikva pendant près de deux ans, prêcha aux agriculteurs pour qu’ils observent le Chabath et les mitsvoth qui dépendent de la terre et construisit aussi deux beaux mikvé.

Jusqu’à son dernier jour, il ne montra aucun signe de vieillesse. Quand il eut quatre-vingt dix ans, il écrivit son dernier livre : l’histoire de la vie du Ma’assei Alfess.

Un lundi, parachat Mikets, le 23 Kislev 5701 (1941), Rabbi Ben-Tsion Alfess expira, à l’âge de quatre-vingt dix ans.

 

 
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