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Le Gaon Rabbi Haïm Schemuelevitz Zatsal

Le gaon Rabbi ‘Haïm Schmuelewitz zatsal, qui finit par devenir dirigeant de la grande yéchivah de Mir et qui influença par la lumière de sa Torah des milliers d’élèves en Israël et dans le monde, a connu une jeunesse difficile. Il était orphelin et vivait dans une pauvreté pourtant insignifiante vis-à-vis de la richesse et du plaisir spirituel que ce petit jeune homme trouvait dans les pages de la Guemara.

Pendant la Première guerre mondiale, son père Rabbi Raphaël Alter zatsal se retrouva à Grodna en Pologne, et il y édifia la yéchivah de Grodna. Avant sa mort, il appela son fils ‘Haïm pour lui demander de veiller sur ses sœurs et son frère.

La lourde catastrophe trouva le jeune homme responsable de la vie matérielle de ses deux sœurs et de son petit frère, qui n’avait pas encore cinq ans. Son sens des responsabilités, une qualité que Rabbi ‘Haïm considérait comme la base de la nature humaine, l’obligea à se préoccuper des ressources du foyer devenu orphelin. C’était au début de la famine qui sévit en Pologne pendant les années de la guerre. ‘Haïm passait les heures de la journée au marché, pour tirer de son travail les quelques sous nécessaires à l’existence de la famille. Pendant le reste de la journée et les longues nuits, il étudiait la Torah. Ses sœurs et son frère racontaient qu’ils ne se souvenaient pas de l’avoir vu dormir. Le jeune homme passait des nuits entières à noter les explications de Torah qui lui étaient venues à l’esprit pendant ces heures de travail au marché. Avec une assiduité qui ne connaissait aucune fatigue et avec un dévouement sans bornes, il inscrivit dans son âme de brillantes pages dans l’histoire de son élévation et de son perfectionnement dans la Torah, pendant ces jours difficiles.

Un jour, Rabbi ‘Haïm raconta à ses élèves à un moment propice : « Quand j’arriverai au Ciel après cent vingt ans, on me demandera où je voudrais aller, et je dirai que je voudrais aller au Gan Eden.

– Pourquoi au Gan Eden ? – Parce que j’ai étudié la Torah.

– Mais chez toi toute l’étude de la Torah a été un plaisir… – Alors que leur dirai-je ? Qu’ils ont raison ! Mais ils seront d’accord que je ne mérite pas non plus le Guéhénom. Alors je proposerai un compromis : Amenez-moi un shtender, un verre de thé et un traité Nédarim, et je continuerai à étudier…

Le sentiment de décalage est plus grand

Les prières du Roch Yéchivah de Mir étaient connues. Ses prières sur les tombes des tsaddikim, sur lesquelles il se rendait régulièrement, étaient un événement particulier. Un jour, au cours d’un de ses voyages en Galilée, il est allé sur la tombe de Rabbi Chimon bar Yo’haï, Rabbi Méïr Ba’al HaNess, le Rambam et le Ridbaz. Pendant ce voyage, il fit la remarque que plus le défunt était proche de notre génération, plus le sentiment d’avoir un rapport avec lui était grand et meilleure était la prière. Et plus les générations étaient éloignées, plus le sentiment d’un fossé s’approfondissait, et plus il était difficile de prier…

Il y avait des tombes de tsaddikim sur lesquelles il versait des larmes comme de l’eau, comme la tombe du saint Or Ha’Haïm, que Rabbi ‘Haïm appelait Rabbi, « mon maître ». Il allait sur sa tombe pour lui demander pardon d’avoir eu un avis différent du sien en ce qui concerne certains versets… Sur certaines tombes, il disait des prières spéciales. Sur les tombes des Patriarches, il demandait miséricorde d’un cœur bouillant pour trois choses : pour que les morts d’Israël trouvent une sépulture en ayant un corps intègre ; pour ceux qui sont loin de la Torah et des mitsvot, il demandait qu’ils méritent d’ouvrir les yeux et de voir la vérité ; et pour le peuple d’Israël sur sa terre, il demandait aux saints Patriarches de monter devant le Trône de gloire et de prier pour la paix.

Sur la tombe de notre mère Ra’hel, Rabbi ‘Haïm pleurait et demandait : « Mère Ra’hel, le Saint béni soit-Il te demande « empêche ta voix de pleurer et tes yeux de se remplir de larmes ». Le père demande que tu arrêtes de pleurer. Mais ton fils te demande, mère, de ne pas arrêter de pleurer. Monte devant le Trône de gloire et demande miséricorde pour tes enfants qui se trouvent dans le malheur ! »

Dans l’un de ses cours la veille de Yom Kippour, Rabbi ‘Haïm a raconté qu’il était allé prier sur les tombes des tsaddikim, mais il avait senti que sa prière n’avait pas été exaucée. En revenant de la tombe du saint Or Ha‘Haïm, il était passé devant Yad Avchalom. Rabbi ‘Haïm était resté un long moment muet devant la stèle, la considérant comme en méditant. A la stupéfaction de ceux qui l’accompagnaient, il parut soudain se mettre à prier. Ils le regardaient – quelle raison y a-t-il de prier devant ce monument ? Avchalom était un homme corrompu, assassin, pécheur. Son père David avait dû le faire remonter de sept abîmes pour le sauver du Guéhénom ! Il répondit : Je vais vous dire quelle prière j’ai faite, et elle a été entendue :

« Maître du monde, quand quelqu’un dit à son ami « je pardonne », ce ne sont que des paroles. Seul un père, quand il dit « je pardonne », pardonne véritablement. Combien le roi David a été poursuivi par son fils rebelle, et combien de malheurs celui-ci lui a causé ! Et pourtant, en tant que père, il a pardonné. Maître du monde ! Tu es un père et Ton pardon est réel. Je T’en prie, dis « Je pardonne » !

Il avait une tradition du ‘Hafets ‘Haïm de parler la soir de Yom Kippour des juifs de Russie. Le tiers du peuple se trouve aux mains des Russes, on les empêche d’accomplir les mitsvot et ils s’éloignent peu à peu de leur Créateur. Rabbi ‘Haïm estimait que chaque année qui passait ne faisait qu’approfondir l’abîme de la destruction de ce judaïsme. Pendant les années où personne ne rêvait qu’un juif puisse sortir de Russie, Rabbi ‘Haïm se tenait sur l’estrade et appelait à leur libération, comme si la chose était une réalité absolue.

Le pouvoir des larmes

Parce qu’il entendait mal, il avait l’habitude de se tenir près de celui qui lisait la Torah et de tendre l’oreille. En entendant le passage de la vente de Yossef et en entendant la haphtara sur ‘Hana et Penina, Rabbi ‘Haïm éclatait en larmes amères. Au moment de la lecture de la méguila de Ruth, il pleurait aussi à chaudes larmes. La description des souffrances de Rabbi Akiva et de la fille de Kalba Savoua lui donnait une grande émotion. Dans un certain cas, alors qu’il donnait un cours de moussar de l’estrade, il expliqua longuement ce qui disent les Sages à ce propos. Tout à coup, des larmes amères se mirent à arroser son corps. Les larmes qui étouffaient sa gorge l’empêchaient de continuer.

Quand Rabbi ‘Haïm entendait parler d’un malade quelconque, il éclatait en pleurs. Parfois, il marchait de long en large dans sa chambre, sans repos et sans répit, de douleur. Quand des grands d’Israël tombaient malades, Rabbi ‘Haïm insistait pour assister à toute prière en commun qui avait lieu auprès des vestiges de notre Temple. Une fois, quelques mois avant son décès, il changea l’heure d’un cours du soir au midi, pour pouvoir participer à la prière au moment fixé. On voyait sur lui que la douleur de l’autre le touchait jusque dans les profondeurs de son âme, et qu’à l’intérieur de son cœur il ressentait dans toute leur intensité les souffrances de cette personne. Dans ses prières et dans ses supplications, il était emporté par un courant puissant d’émotion, qui influait sur tous ceux qui se trouvaient dans son entourage. On voyait sur lui clairement le concept de devenir malade pour l’autre.

Ses cours de moussar devinrent une base pour les idées de moussar qui se gravaient profondément dans la conscience de ceux qui étudient la Torah et le moussar. Le jour de sa mort, le 3 Tévet, est considéré par les batei moussar comme un jour d’élévation spirituelle et de travail sur les midot. Que son mérite nous protège.

 

 
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