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Rabbi Meir Ye’hiel Halevi D’ostrovtsa

Méïr Ye’hiel était un enfant prodige. Son père gagnait sa vie en cuisant des petits pains, et il était très pauvre. Il se levait à l’aube, dès le chant du coq, et à la lumière d’une petite bougie, Méïr Ye’hiel voyait, par la porte de la chambre, son père Rabbi Avraham Yitz’hak pétrir la pâte de ses mains fines et maigres. Le dos courbé, il se tenait par-dessus la pâte, et à chaque fois que ses mains plongeaient pour pétrir, un murmure s’échappait de sa gorge : « Prière du pauvre qui se sent défaillir et répand sa plainte devant Hachem. » A ce moment-là, des larmes coulaient de ses yeux dans la pâte. Et le matin après la prière, quand sa mère lui tendait du pain de la boulangerie de son père auquel il avait travaillé à la sueur de son front, il lui venait à l’esprit le verset des psaumes : « C’est en vain que vous vous levez tôt, que vous prolongez tard vos veilles, mangeant un pain péniblement gagné ! » Lorsqu’il grandit, il avait la nourriture en dégoût, et il passa la plus grande partie de sa vie dans le jeûne.

Rabbi Méïr Ye’hiel est né en 5612 (1852) dans la petite ville de Savin près de Varsovie.

Dans sa tendre enfance, on ne lui trouva pas d’instituteur qui puisse répondre à toutes ses questions, et quand il eut dix ans, son père l’emmena chez Rabbi Elimélekh de Grodzinsk.

En arrivant dans la cour du Admor de Grodzinsk, le jeune garçon entendit une question qui était posée et à laquelle on ne trouvait pas de réponse. Tout le monde s’efforçait de trouver la réponse, mais en vain. Dans la tête du jeune garçon jaillit une réponse, mais ayant honte de parler en public, il trouva une craie et écrivit la réponse sur la porte du beith midrach. Quand, ensuite, ceux qui étudiaient dans le beith midrach virent cette écriture d’une main enfantine sur la porte, ils regardèrent ce qu’elle disait et trouvèrent la réponse à la question difficile qui les occupait. Cet incident se répandit et arriva rapidement aux oreilles du Admor de Grodzinsk. Celui-ci ordonna au père de lui laisser le jeune garçon, dont il s’occupa personnellement avec dévouement.

Son père Rabbi Avraham Yitz’hak rentra à Savin, et le jeune Méïr Ye’hiel resta à Grodzinsk. De jour en jour il s’élevait dans les degrés de la Torah et de la crainte du Ciel, jusqu’à devenir célèbre par l’acuité de son intellect et par sa grande érudition.

Quand il eut dix-sept ans, il se maria dans la petite ville de Worka et alla vivre chez son beau-père, où il étudia la Torah en sainteté et en pureté jusqu’à atteindre une grande stature. Un jour, il s’enferma dans une pièce, et pendant les quatre semaines qui séparent Pourim de Pessa’h il étudia tout le Talmud et le termina la veille de Pessa’h.

Sa renommée s’étendit au loin, et beaucoup d’érudits venaient chez lui pour entendre la Torah de sa bouche. A l’âge de vingt-huit ans, il fut appelé à devenir le Rav de la ville de Sakranovitz, une grande ville où vivaient des milliers de juifs. En 5649 (1889), la ville d’Ostrovtsa demanda à Rabbi Méïr Ye’hiel de devenir son Rav. Il passa à Ostrovtsa et s’occupa jusqu’à sa mort de tout ce qui concernait la ville. Après la mort de son Rav, le Admor de Grodzinsk, les ‘hassidim vinrent le trouver pour le couronner Admor, et des milliers de juifs de tous les coins de la Pologne affluèrent pour profiter de sa Torah et de ses conseils.

Le Rabbi d’Ostrovtsa décida de jeûner. Il priait et étudiait toute la journée, mais ne mangeait pas. La nuit il mangeait un biscuit, un verre de thé, et continuait à jeûner. Rabbi Ye’hiel jeûna pendant quarante ans, jusqu’à sa mort. Sa famille essayait de le pousser à renoncer à ce comportement, mais il ne les écoutait pas, et quand le Rabbi de Gour tenta de le convaincre d’interrompre son jeûne, il lui répondit : Vous avez le mérite de vos pères ! Son père était le Sefat Emet, son arrière grand-père le ‘Hidouchei HaRim. Ses ancêtres avaient déjà jeûné aussi pour lui. Mais moi qui suis le fils d’un boulanger, je n’ai pas de mérite des ancêtres, et je dois donc jeûner pour moi-même.

Il luttait pour tout ce qui est saint en Israël avec une extraordinaire fermeté, mais sans négliger d’écouter un cœur qui était plein de pitié pour chaque juif.

Un jour arriva à Ostrovtsa un théâtre juif ambulant, qui voulut jouer pendant le Chabat. Rabbi Méïr Ye’hiel ne réussit pas à empêcher la représentation, malgré tous ses efforts.

Que fit-il ? Un petit moment avant le début de la pièce, il arriva lui-même dans la salle et s’installa sur un banc de la première rangée. Le public qui venait et voyait le Rav au premier rang avait honte d’entrer et se dépêchait de s’en aller. Naturellement, le spectacle n’eut pas lieu. A la fin du Chabat, Rabbi Méïr Ye’hiel appela les directeurs et paya de sa poche les pertes qu’il leur avait fait subir par l’annulation du spectacle.

Un jour, la rabbanit assigna en jugement Ya’akov le tailleur, qui était locataire dans la maison du Rav, parce qu’il n’avait pas payé son loyer. Elle ne voulait pas que le din Torah se déroule devant son mari, mais celui-ci dit : « C’est moi qui défendrai Ya’akov le tailleur. » Ils se présentèrent au tribunal rabbinique, et le Rav formula une défense très simple : « La maison n’est pas à moi… les ’hassidim et les notables l’ont achetée et me l’ont donnée en cadeau, et je ne veux pas que ce cadeau provoque des ennuis à un juif pauvre qui a une grande famille… » Le tailleur fut acquitté. Le Rav sortit du tribunal heureux, avec en bouche le verset de Kohélet « Puis je me mis à observer tous les actes d’oppression qui se commettent sous le soleil : partout des opprimés en larmes, et personne pour les consoler ! »

Il aimait tout homme d’Israël comme un père aime son fils. Il prenait part aux malheurs d’un juif de tout son cœur et de toute son âme. Au moment de la Première guerre mondiale, sa prière durait pendant de longues heures. Le plancher sur lequel il se tenait était mouillé de ses larmes.

Rabbi Méïr Ye’hiel resta le Rav d’Ostrovtsa pendant quarante ans. Il créa une nouvelle façon d’étudier en Pologne, la méthode de l’acuité. Il fit des centaines et des milliers d’élèves qui répandirent la Torah de leur Rav dans le monde entier.

A la fin de sa vie, son corps ne pouvait déjà plus supporter de nourritures solides. Il avait fondu et n’avait plus que la peau sur les os. Les médecins disaient qu’il ne vivait que par miracle. Il était toujours couché sur un lit, enveloppé d’une couverture chaude, car son corps n’avait plus de chaleur naturelle, il était purifié, et la peau de son visage brillait d’un éclat céleste.

Le 19 Adar 5688 (1928), Rabbi Méïr Ye’hiel était couché comme à son habitude, mais les habitants de la maison s’aperçurent qu’il ne se lèverait plus de son lit de malade. Les médecins tentèrent de le sauver de toutes leurs forces, mais en vain, le Admor d’Ostrovtsa ferma les yeux pour toujours. Une grande foule suivit son cercueil, et quand on le descendit dans la tombe, le Admor de Radzimin dit de lui : « Si la terre savait qui elle reçoit en son sein, elle ouvrirait sa bouche et dirait un cantique… »

L’un de ses disciples au Canada rassembla ses merveilleux commentaires et édita des livres intitulés : Méïr Eïneï ‘Hakhamim.

 

 
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