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Rabbi Ya’akov Kranz • « Le Maguid de Doubno »

Rabbi Ya’akov Kranz est né à Zateil, en Lituanie, en 1740 (5500). C’est le plus grand prédicateur de tous les temps. Il est connu de toutes les communautés d’Israël sous le nom de « Maguid de Doubno », nom de la ville dont il était rabbin.

Rabbi Ya’akov Kranz avait un pouvoir considérable dans la bouche, une bouche qui laissait échapper des pierres précieuses et créa une catégorie particulière d’histoires et de narrations. Beaucoup ont suivi ses traces, mais sans atteindre sa grandeur.

Par ses paroles et ses paraboles, le Maguid de Doubno réussissait à enflammer le public et à susciter en lui des sentiments de sainteté et des pensées de Techouvah. Il arrivait souvent que l’auditoire sanglote amèrement en l’écoutant. A une certaine période, il se trouvait à Lvov, la ville de l’auteur de Yéchouoth Ya’akov. En même temps qu’un autre Rav, parmi les plus grands érudits de la génération, qui vivait dans cette ville, ce gaon venait régulièrement au cours que le Maguid donnait entre les prières de minh’a et arvith, dans l’une des synagogues de la ville.

Le dernier jour de son séjour dans cette ville, le Maguid leur demanda de ne pas venir à son cours parce que le public allait sangloter, et que comme tous deux étaient âgés, ces larmes prolongées risquaient de leur faire du mal. L’auteur du Yéchouoth Ya’akov répondit qu’il exagérait. Les deux rabbanim étaient naturellement présents au moment voulu à la synagogue pour écouter le cours... Immédiatement, dès que le Maguid monta à l’estrade, il dirigea un regard perçant vers le public, saisi de crainte. L’auteur de Yéchouoth Ya’akov se mit immédiatement à pleurer. Son ami s’efforça de se contenir, mais au bout d’un quart d’heure il pleurait lui aussi à gros sanglots, au point qu’il fut malade pendant longtemps. Telle était sa puissance.

Mais le Maguid de Doubno n’était pas seulement un prédicateur, c’était aussi un grand érudit en Torah. Chaque nuit il se levait à minuit, et après avoir dit le tikoun, s’installait au Beith Hamidrach pour étudier jusqu’aux premières lueurs de l’aube. Après la prière, quand il n’allait pas d’une communauté à l’autre, il étudiait jusqu’à la tombée de la nuit.

Il était extrêmement proche du Gaon de Vilna, qui l’aimait beaucoup. Nous avons gardé deux lettres où le Gaon appelle le Maguid « celui qui est cher à mon âme », où il le supplie de venir le voir en toute diligence, et où il manifeste sa certitude qu’il « ne tardera pas, afin de me ramener à moi-même ».

L’humilité du Maguid de Doubno s’exprime dans une réponse qu’il a écrite au Gaon après une nuit de Chavouoth, l’une des fois où il avait séjourné chez lui.

La nuit de Chavouoth, le Gaon avait l’habitude, comme c’est courant en Israël, de dire le tikoun de la nuit de Chavouoth, qui consiste à lire le début et la fin de tous les livres de la Bible ainsi que le début et la fin de tous les traités de la Guemara. Mais le Maguid de Doubno s’enfonça dans l’étude d’un certain problème, et le Gaon lui demanda pourquoi il déviait de la coutume.

Il répondit : « A quoi est-ce que cela ressemble ? A un marchand qui a dans sa boutique tout un assortiment de marchandises. Il met dans l’étalage un exemplaire de chaque sorte, et cet étalage témoigne de tout ce qu’il possède. Mais le marchand qui est pauvre et n’a que quelques objets sans valeur peut mettre en étalage la totalité de sa marchandise, puisque à l’intérieur de la boutique il n’y a plus rien. C’est ce qui se passe ici : vous qui connaissez toute la Torah, vous étudiez pendant cette nuit-là des « échantillons » de chaque sorte. Mais moi qui suis pauvre et sans valeur en Torah, je suis obligé de traiter la marchandise elle-même... »

Nous allons donner la parabole qu’il a improvisée en entendant l’explication du Gaon de Vilna sur une michnah de Pirkei Avoth.

La michnah dit : « Malgré toi tu nais, malgré toi tu vis, malgré toi tu meurs, et malgré toi tu devras rendre des comptes devant le Saint béni soit-Il. »

Que signifient ces quatre « malgré toi » ?

Le Gaon explique cette michnah d’après une michnah du premier chapitre de Baba Batra. Il y est question de deux personnes dont les champs sont mitoyens. La Michnah dit que si l’un des propriétaires entoure le champ de l’autre d’une barrière de trois côtés, celui-ci n’est pas obligé de participer aux frais de l’érection de la barrière, bien qu’il est évident qu’il profite de la barrière qui a été construite autour de son champ. Mais, continue la Michnah, si le propriétaire du champ entouré ferme de sa propre initiative le quatrième côté, on lui fait payer tous les frais pour toutes les clôtures, bien sûr proportionnellement, car ce qu’il a fait montre sa satisfaction des barrières, et il ne peut plus prétendre qu’elles ne lui servent à rien.

Ainsi, dit le Gaon, l’homme peut pendant toute son existence affirmer qu’il ne voulait pas de la vie et qu’il n’en jouit nullement, car « malgré toi tu es né et malgré toi tu vis.

Mais étant donné que lorsqu’il arrive sur son lit de mort il fait tout ce qu’il peut pour continuer à vivre, appelle des médecins et dépense une fortune en remèdes pourvu qu’on prolonge sa vie le plus possible, il exprime ainsi son désir de vivre et sa difficulté à y renoncer. Par conséquent si « malgré toi tu meurs », tu dois rendre des comptes au Créateur sur tous les actes de ta vie. C’est l’explication du Gaon.

Après l’avoir entendue, le Maguid dit :

« Je vais vous donner une parabole. Un homme avait deux filles, l’une laide et l’autre coléreuse. Elles étaient en âge de se marier, mais il leur était difficile de trouver un époux à cause de leurs défauts respectifs. Un jour arriva un chadkhan malin qui réussit à les marier. A celle qui était laide, il trouva un mari aveugle, et à celle qui était coléreuse il trouva... un sourd. Ces deux couples vivaient en harmonie, jusqu’au jour où arriva dans la ville un grand médecin qui savait guérir toutes les maladies. Parmi ceux qui vinrent demander son aide figuraient ces deux maris. Le médecin prépara ses potions, les leur fit boire, et les délivra de leurs maux. Alors l’aveugle se mit soudain à voir, il constata la laideur de sa femme et en fut bouleversé. Le sourd de son côté se mit à entendre, et les cris de colère de sa femme le rendirent fou.

Les deux maris décidèrent entre eux de ne pas payer le médecin. Il ne leur avait rendu aucun service, bien au contraire : en enlevant leur infirmité, il leur avait causé du tort. Leur vie était devenue un enfer. Le médecin se vit obligé de les convoquer en din Torah. Il s se présentèrent donc devant le Rav de la ville, et décidèrent d’accepter sa décision quelle qu’elle soit.

Le Rav écouta les arguments des deux parties, les pesa, et demanda enfin au médecin s’il était capable de les ramener à l’état précédent. « Il n’y a rien de plus facile », répondit le médecin, et il se mit immédiatement à préparer ses potions. Les deux maris prirent peur et refusèrent absolument d’accepter ce verdict. Le Rav leur dit : « S’il en est ainsi, dépêchez-vous de lui payer ce que vous lui devez, car vous venez de faire la preuve que vous êtes satisfaits de votre guérison. »

La morale de l’histoire est claire...

Ses élèves ont rassemblé ses enseignements dans les ouvrages Ohel Ya’akov, Hamidoth et Kol Ya’akov.

Il a ramené beaucoup de gens dans le droit chemin, et jusqu’à aujourd’hui ses paroles et ses paraboles nourrissent les cœurs de tout le peuple.

Il est mort en 1805 (5565).

 

 
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