L’éducation, base de l’humilité

D’où vient Sinaï? demande le Midrach (Midrach Cho’her Tov 68). Du Mont Moriah. Il a été prélevé comme la ’Halah de la pâte, du lieu où Isaac devait être sacrifié. Ainsi Dieu dit: «Puisque Isaac devait y être sacrifié, il serait bon que ses enfants y reçoivent la Torah.»

On peut se poser au moins trois questions sur ce passage:

1) Si le Mont Moriah est d’une telle importance, pourquoi la Torah n’y fut-elle pas donnée (sans en prélever une partie qu’on mettrait à l’endroit du Mont Sinaï)?

2) Que signifie exactement «a été prélevé»? Pourquoi nos Sages ajoutent-ils «comme la pâte du levain»?

3) Quel est le rapport entre le sacrifice d’Isaac et le don de la

Torah. Les deux doivent-ils avoir lieu au même endroit?

La Torah (Deutéronome 20:5) ordonne: «Si quelqu’un a bâti une maison neuve et n’en a pas encore pris possession, qu’il parte et s’en retourne à sa maison, car il pourrait mourir dans la bataille, et un autre pourrait l’inaugurer.» Que signifie exactement «car il pourrait mourir»? Tous ceux qui partent en guerre sont exposés au danger. Que veut dire alors «inaugurer la maison»? C’est que la construction même de la maison implique l’accomplissement de mitsvoth qui en sont inséparables: depuis les mitsvoth liées à la maison elle-même, comme la mézouzah (Deutéronome 6:9), l’appui (id. 22:8), jusqu’à celles qu’on accomplit à l’intérieur des murs, telles que la cacherouth, la pureté de la famille, le précepte de «procréer et multiplier», l’étude de la Torah, la présence de la Providence Divine dans le foyer, etc.. qui constituent les bases même de la Torah. Si l’homme et la femme ont du mérite, enseigne à cet effet le Talmud (Sotah 17a), la Chékhinah demeure avec eux; s’ils n’en ont pas, ils se font dévorer par le feu. L’homme accomplit des mitsvoth et de bonnes actions dans chaque coin de sa maison; il l’imprègne tout entière de sainteté et il lui sera difficile d’y commettre une faute. Les poutres et les murs de la maison témoigneront contre lui s’il y commet un péché (Ta’anith 11a). De la même façon qu’on éduque ses enfants, on éduque et imprègne sa maison de service de Dieu.

Si, comme le rapporte le Talmud (Yoma 47a; Vayikra Rabah 20:7), Kim’hit a engendré sept grands prêtres, c’est parce que les poutres de sa maison n’ont jamais vu les tresses de sa chevelure. Elle tenait à les cacher même quand elle se trouvait seule à la maison afin de l’imprégner de sainteté. Grâce à sa pudeur, elle a eu le mérite d’avoir sept grands prêtres.

Donc si on s’est construit une maison sans y avoir accompli les mitsvoth qu’on avait l’intention d’y faire, on n’a pas le droit de sortir en guerre. On sera jugé pour ne pas l’avoir inaugurée par des mitsvoth et de bonnes actions. D’ailleurs Yonathan ben Ouziel traduit ainsi, en araméen, le verset mentionné ci-dessus: «Si quelqu’un a bâti une maison neuve, et n’y a pas encore fixé une mézouzah, etc...» Car c’est la mézouzah et d’autres mitsvoth qui constituent les fondements de la maison juive et engendrent l’humilité chez l’homme, garantie de l’accomplissement des commandements divins.

Sur le Mont Moriah, notre patriarche Isaac a été éduqué pour craindre l’Eternel et Le servir avec le maximum de dévouement. Nos Sages (Bérakhoth 62b; Ta’anith 16a; Zohar III, 53b) enseignent que lorsque le Peuple d’Israël se trouve en détresse, les «cendres» d’Isaac montent vers le Saint, béni soit-Il, et son mérite les épargne. D’où proviennent en fait ces cendres? Isaac n’a pas été brûlé! C’est que sa modestie et son humilité l’ont fait accéder au niveau de cendre et poussière éparpillées aux quatre coins du monde par le vent. C’est comme la ’halah que l’on prélève de la pâte: c’est bien du pain, mais quand on la brûle, elle se transforme littéralement en cendre.

Du Mont Moriah, enseigne le Talmud (Ta’anith 16a; Béréchith Rabah 55:9) est sorti un message éducatif pour le Peuple d’Israël: celui de la modestie, la soumission et la crainte du Ciel. Tout comme le Mont Moriah qui a été déraciné, la Torah ne reste pas en place et on la trouve partout. Nous aussi, nous devons accomplir des mitsvoth partout, dans la modestie la plus complète: c’est là l’essentiel. Comme nous l’avons vu, la Torah a été donnée sur le Mont Sinaï car c’est la plus petite des montagnes et elle fait partie du Mont Moriah.

Désirant s’imprégner de Torah et mitsvoth pour vaincre le mauvais penchant, les enfants d’Israël se sont donc installés dans le désert où les forces du mal sévissent particulièrement, à proximité du Sinaï, qui fait partie du Mont Moriah. Ils voulaient accéder à de très hauts niveaux spirituels dans ce mont, qui méromem Yah (Moriah = Méromem Yah) élève l’Eternel. Remarquons la similitude des valeurs numériques de YaH (Dieu) et gaavah (15): par l’étude de la Torah, on ne revêt de Majesté que l’Eternel.

La section biblique porte le nom de Yithro parce que ce dernier, fuyant tout honneur, est parti dans le désert pour s’imprégner du culte divin et combattre le mauvais penchant.

C’est ce que firent également les enfants d’Israël: en fuyant les honneurs, vers le désert ils furent alors «poursuivis» par le Mont Moriah, qui les éleva et les fit accéder à des niveaux sublimes.

Commentant le verset: «Ainsi tu parleras ko tomar à la maison de Jacob, vétagued et tu feras cette déclaration aux enfants d’Israël» (Exode 19:3). Le Talmud (Chabath 87a) explique que l’Eternel utilise un langage tendre à l’égard de la Maison de Jacob, c’est-à-dire pour les femmes, et un langage dur à l’égard des enfants d’Israël, c’est-à-dire pour les hommes. Pourquoi deux différents tons de discours? Pourquoi d’autre part, contrairement à ce qui se passe d’habitude, le verset mentionne-il les femmes avant les hommes?

C’est pour que l’homme apprenne la vertu de la modestie de la femme. Si sur le Sinaï, la Torah lui rappelle de se conduire en toute humilité, qui le lui rappellera dans son foyer, sinon sa femme? Le Midrach enseigne que tout en étant dure, la femme est née d’un lien discret, pudique (Béréchith Rabah 18:3). C’est pourquoi, pour apprendre la modestie, qui est à la base même de toute la Torah, elle a besoin de ko tomar «Tu diras ainsi» et «Je suis l’Eternel, ton Dieu.»

 

L’humilité, fondement de la Torah
TABLE DE MATIERE
La bataille d’Amalek: élimination de l’orgueil et des forces étrangères

 

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