La sainteté du Chabath efface le péché du veau d’or

Commentant le verset: «Quand tu feras le dénombrement général des enfants d’Israël, chacun d’eux paiera au Seigneur le rachat de sa personne lors du dénombrement, etc.» Le Talmud (Bava Bathra 10b) enseigne: «Moïse demanda au Saint, béni soit-Il: «Maître de l’univers, par quoi s’élèvera la gloire d’Israël?» «Par Ki Tissa, lui répondit-Il.» Ce Midrach soulève de nombreuses questions:

1) Pourquoi est-ce précisément par Ki Tissa que s’élèvera leur gloire?

2) Dans ces circonstances, pourquoi est-ce précisément cette section biblique qui mentionne le péché du veau d’or?

3) Quel rapport peut-on établir entre le dénombrement des enfants d’Israël par le demi-chéquel et le péché du veau d’or?

4) Quel rapport peut-on établir entre le péché du veau d’or et le rayonnement du visage de Moïse, mentionné à la fin de la parachah? (Exode 34:30).

5) Quel rapport peut-on établir entre le précepte de l’observance du Chabath, sur laquelle s’étend notre parachah, et le péché du veau d’or qui est mentionné immédiatement après?

6) Pourquoi, à l’issue de cette mitsvah, le verset stipule-t-il: «Dieu donna à Moïse, lorsqu’il eut achevé de s’entretenir avec Lui sur le Mont Sinaï, les deux Tables du statut»? (id. 31:18).

C’est que le monde a été essentiellement créé pour le Chabath qui porte le nom de bérith, comme il est écrit: «Les enfants d’Israël seront donc fidèles au Chabath, en l’observant dans toutes leurs générations comme un pacte immuable» (id. 31:16). D’autre part il est écrit: «S’il n’y avait pas mon pacte (la Torah), le jour et la nuit, le ciel et la terre ne pourraient plus subsister...» (Jérémie 33:25): le Chabath dépend donc de la Torah (les deux sont des pactes). D’ailleurs, dans le mot BéREChITh, on trouve Chabath (aspect de qui craint le Chabath, IRA ChaBaTh), ainsi que le terme oth (pacte, signe; BOTh avec les 3 autres lettres ChIR et le collel (plus 1) qui font Alef, vav, et Tav: OTh) et BéRiTh. Ainsi on trouve donc dans Béréchith une allusion au Chabath, au bérith, Oth. «Au commencement Dieu créa le monde»: le monde a été créé pour le Chabath.

Cela est d’autant plus vrai que, nous l’avons vu, la Torah porte le nom de réchith (Béréchith Rabah 1:2), ainsi que celui de bérith et de Oth. Comme l’enseigne le Talmud (Chabath 33a; Tana Débé Elyahou Rabah 3), il n’est d’Alliance que Sa Torah, qui est un signe (oth) entre les enfants d’Israël et le Saint, béni soit-Il. On ne peut concevoir le Chabath sans la Torah, car l’homme est plongé dans ses affaires pendant toute la semaine, et même le Sage qui étudie la Torah pendant toute la semaine, ne peut faire une introspection et un examen de conscience que le jour de repos où il reçoit une âme supplémentaire (Betsah 16a). C’est elle qui lui donne la force de s’élever constamment en semaine (Zohar I, 265a; II, 63b): les six jours de la semaine sont bénis par le Chabath. L’homme doit consacrer ce jour de repos saint à l’étude de la Torah (Tana Débé Elyahou Rabah 1).

On mentionne précisément la différenciation (havdalah) entre le sacré et le profane, les lumières et les ténèbres, le samedi soir [et à l’issue des fêtes solennelles] dans la bénédiction de «dispensateur de la sagesse», parce que pendant le Chabath on est plus imprégné de sagesse, d’intelligence, et de perspicacité qu’en semaine. D’où proviendrait cette «havdalah» sinon de la connaissance sainte? (Yérouchalmi, Bérakhoth 5:2). Cette sainteté ne fait d’ailleurs que s’accroître au fil des Chabathoth, tout au long de la vie de l’homme. L’étude de la Torah et la crainte du Ciel ne font que s’intensifier. On ressent vraiment un avant-goût du monde futur qu’il est dommage de perdre.

Cependant, seul celui qui a peiné la veille du Chabath, mangera le Chabath (Avodah Zarah 3a), et la récompense est proportionnelle à l’effort (Avoth chap. 5 fin; Zohar III, 278b). C’est donc un immense bienfait qu’a manifesté le Saint, béni soit-Il, en nous imprégnant de cette âme supplémentaire le Chabath, qu’on ne reçoit que selon ses efforts la veille de Chabath.

La gloire d’Israël s’élèvera; la rédemption viendra donc à Ki Tissa: en d’autres termes, quand les Juifs se sanctifient et s’élèvent aux yeux des nations, ne serait-ce qu’un Chabath. Car la guématria de Ki Tissa (avec le collel, plus 1), est similaire à celle de Chabath, et les premières lettres de TiSsA forment Tichmor Chabath A’hath (observe un Chabath). Car celui qui observe un premier Chabath est généralement poussé à observer le prochain, et à se sanctifier encore davantage. C’est d’ailleurs pourquoi les anges qui accompagnent le Juif de sa sortie de la synagogue à son domicile le vendredi soir, lui souhaitent de passer le prochain Chabath au moins de la même façon que celui-ci (Chabath 119a), et comme on l’a vu, Dieu joint une bonne pensée à l’action. Deux Chabathoth ont donc été observés, qui permettent la Rédemption du Peuple d’Israël (Chabath 118b; Zohar ‘Hadach 36) et l’élévation de Sa gloire au sein des nations...

C’est pour montrer à Moïse qu’on ne peut se sanctifier et s’élever que par le Chabath, que le verset mentionne de suite après la mitsvah de ce jour saint: «Dieu donna à Moïse kékhaloto, lorsqu’il eut achevé de s’entretenir avec lui sur le Mont Sinaï...» Le Zohar (III, 272a) enseigne d’ailleurs à cet effet que le Chabath est une reine et une fiancée, kalah: c’est le premier Chabath, but même de la création du monde, qui permet à l’homme de s’élever: le trésor gardé dans la Trésorerie de Dieu (Chabath 10a; Zohar III, 122b) a été offert comme don au Peuple d’Israël: c’est sa fiancée qui apporte à tout Juif une dot précieuse, l’âme supplémentaire qui lui permet de se délecter de l’Eternel et de connaître un bonheur spirituel illimité de semaine en semaine.

Traitant du premier verset de cette section biblique, Rabbi Yits’hak Méir de Gour écrit dans son ouvrage ’Hidouché HaRim: «Le verset aurait dû stipuler raché béné Israël et non roch. C’est que, explique l’Admour, dans le terme roch, toute lettre s’élève à la suivante (rech à chin, aleph à beth, chin à tav), et on obtient ChaBaTh: en d’autres termes, par la sanctification du Chabath, on s’élève en tête.» Ki Tissa eth Roch, TiSsA est formé des premières lettres de : Tichmor Shabath A’hath: observe un seul Chabath.

Parlant de la suite du verset: «Chacun d’eux paiera au Seigneur kofer, le rachat de sa personne», Rabbi Sim’hah Bounam Alter de Gour, auteur de Lev Sim’hah, fait remarquer que kofer a la même guématria (avec le nombre des lettres) que chaï (cadeau) (310), allusion au Chabath qui requiert de grands préparatifs, comme la réception d’un énorme joyau. Toute la semaine portant le nom de ‘erev Chabath, celui qui y déploie de grands efforts pourra en jouir pleinement. Comme nous l’avons vu, Moïse a accédé aux niveaux spirituels les plus élevés qu’on puisse concevoir; il a ressenti le goût du monde futur, et comme son âme se propage à celle de tous les Juifs, chacun d’entre nous peut se délecter de ce trésor offert par la fiancée à son fiancé. Cela implique cependant avodath parekh (PaReKh a les mêmes lettres que KoPheR). Ce n’est qu’au prix d’un dur labeur qu’on peut accéder à ce cadeau, chaï, et l’élever. KoPheR vient du mot KiPouR, qui implique la téchouvah (repentir). C’est à Chabath, qui a les mêmes lettres que téchev (ou téchouvah), qu’on se repent essentiellement. «Tu réduis téchev le faible mortel en poussière, et Tu dis: Revenez chouvou, fils de l’homme» (Psaumes 90:3). Car ce n’est que par la téchouvah qu’on ressent le plus la grandeur du Chabath. Le Talmud (Chabath 118b) enseigne à cet effet que celui qui observe le Chabath comme il convient, se voit pardonner ses péchés, fussent-ils aussi graves que ceux de la génération d’Enoch, comme il est écrit: «Heureux qui respecte le Chabath mé’halelo, et ne le profane pas» (Isaïe 56:2). Ne lis pas mé’halelo, mais ma’houl lo, on lui pardonne. Comme nous l’avons vu aussi, si Israël observe deux Chabatoth (Chabath 118b; ou même un seul, peut-on lire dans Yérouchalmi Ta’anith), il est immédiatement sauvé. Car le Chabath conduit à la téchouvah et à l’avènement de David (Sanhédrine 98a).

Si chacun d’entre nous reçoit une âme supplémentaire le Chabath, il peut expier toutes ses fautes à Kipour (qui est appelé Chabath Chabatone): c’est comme le Chabath, le cadeau que fait le Saint, béni soit-Il, aux enfants d’Israël. Mais la téchouvah de Kipour doit impliquer des efforts très ardus: il faut la faire béPhaReKh, en peinant (notons la similitude de Kopher, Kipour et Pharekh). Nous avons vu que l’essence de l’âme supplémentaire qu’on reçoit le Chabath, dépend des efforts qu’on entreprend pour la mériter (Zohar III, 244b). Préparons-nous donc fébrilement au Chabath, comme au jour de Kipour. Nous nous élèverons alors Ki Tissa spirituellement, et «il n’y aura point de mortalité parmi nous» (Exode 30:12), c’est-à-dire que nous ferons taire le mauvais penchant le Chabath, comme nous le faisons taire le jour de Kipour (Nédarim 32b; Zohar III, 232a). Cependant, une téroumah est nécessaire: en d’autres termes, nous devons léhitromem, nous élever dans notre service divin.

L’offrande du demi-chéquel fait allusion au culte divin, accompli dans la soumission et l’enthousiasme à servir Dieu. L’homme doit ressentir qu’il ne représente que la moitié d’un tout: «le pied de l’orgueil ne l’atteindra alors pas» (Psaumes 36:12). Il convient de rechercher l’harmonie et l’équilibre, car tout excès est condamnable dans tous les domaines (Sanhédrine 29a; Zohar II, 233a). Si en cours de semaine on fait preuve d’orgueil, ou on se met en colère, on ne peut pas se préparer comme il convient pour le Chabath... Aspirons donc sans relâche à nous élever chaque jour de la semaine (ne nous disons pas par exemple le dimanche: je suis spirituellement assez riche. Si nous manquons de connaissance divine, n’attendons pas le vendredi pour agir). C’est ce que stipule le verset: «le riche ne donnera pas plus, le pauvre ne donnera pas moins» (Exode 30:15). A cet effet, concernant les préparatifs du Chabath, la maison de Chamaï préconisait de s’y préparer chaque jour de la semaine depuis dimanche, alors que la maison de Hillel préconisait de «louer le seigneur au jour le jour» (Psaumes 68:20) et de se renforcer dans la foi que Dieu pourvoira au nécessaire en temps voulu (cf. Betsah 16a).

Ki Tissa: Il convient de recevoir au plus tôt haRoch, la tête, (c’est-à-dire le Chabath), l’élever, et de le faire sortir au plus tard (cf. Roch Hachanah 9a; Choul’han Aroukh, Ora’h ‘Haïm 261b).

Le péché du veau d’or souilla le trésor que Moïse avait reçu pour les enfants d’Israël. Il porta atteinte en même temps à Moïse et toute leur génération, et surtout affecta le Chabath, jour du repos du Saint, béni soit-Il. Il a ainsi porté atteinte au Chabath, à la Torah et à Israël, pour lesquels le monde a été créé. L’Eternel dit alors à Moïse «Va, descends!» (Exode 32:7) de ta grandeur (Bérakhoth 32a), tu as perdu le trésor du Chabath: les enfants d’Israël ont tout gâché. Le Midrach (Chémoth Rabah 42:3), enseigne que Moïse avait été excommunié par le Tribunal Céleste, et le Peuple d’Israël courait un grave danger, à Dieu ne plaise. Le péché du veau d’or lésa Moïse, vayé’hal Moché (Exode 32:11). Il ressentit la gravité du péché des enfants d’Israël, à cause duquel ils ont perdu le trésor du Chabath: celui de distinguer le ’hol profane, du saint. Aussi pria-t-il en leur faveur, et supplia-t-il l’Eternel de leur restituer leur chaï.

La prière de Moïse fut exaucée, et le Chabath fut rendu aux enfants d’Israël. Moïse descendit de la montagne, et Aharon et tout le peuple virent rayonner la peau de son visage (id. 34:30). «VayéKhaL Moché, Moïse acheva de leur parler...» (id. 34:33), il avait le visage d’une fiancée (KaLah), celui du Chabath. Il avait repris le trésor, et comme on le sait, le Sage revêt l’aspect du Chabath (Zohar III, 29a).

Comment donc les enfants d’Israël ressentiront-ils le rayon de lumière que fit descendre Moïse avec lui du Mont Sinaï? Par Ki Tissa, en d’autres termes, par l’observance du Chabath (TiSsA: Tichmor Shabath A’hath). C’est aussi le Chabath qui expie le péché du veau d’or. Moïse a réussi à éclairer le monde d’un faisceau de lumière, grâce auquel les enfants d’Israël saisirent la sainteté du Chabath et élevèrent leur gloire...

L’Eternel dit à Moïse: «Et toi, parle aux enfants d’Israël en ces termes: «Toutefois, observez mes Chabath...» (Exode 31:12). Seul, toi qui ressens vraiment la sainteté du Chabath, avant-goût du monde futur (Zohar I, 48a) es en mesure de les en imprégner... Après le péché du veau d’or, tu as réussi à annuler la sentence rigoureuse et à intensifier la lumière du Chabath que tu viens de recevoir de nouveau, toi seul es en mesure d’élever la gloire des enfants d’Israël aux yeux des nations...

Dieu a donc consenti à effacer le nom de Moïse de la section hebdomadaire Tetsavéh, mais Il l’a châtié en dépit du fait qu’il ne cherchait exclusivement que le bien-être des enfants d’Israël. Car, comme l’enseigne le Talmud (Makoth 11a), la malédiction du juste est exaucée, même s’il l’exprime sous certaines conditions. En fait, pourquoi Dieu s’est-Il mis en colère contre Moïse? Parce que, Lui explique-t-il, si Je t’efface de Mon livre, qui révélera à Mes enfants la sainteté du Chabath, délice que seul, toi, as pu savourer dans les cieux? Il est donc préférable que tu vives, ne serait-ce que pour prescrire aux enfants d’Israël la mitsvah de chémen, l’huile, c’est-à-dire pour leur expliquer l’essence de néchamah, l’âme supplémentaire (HaChéMeN a les mêmes lettres que NéChaMaH) qu’on reçoit le Chabath, et qui permet de s’élever et de triompher du mauvais penchant tout au long de la semaine. Car les six jours de la semaine correspondent aux six branches du candélabre, trois d’un côté qui préparent le Chabath, et trois de l’autre qui prolongent la sainteté du Chabath, et la septième au milieu qui représente le Chabath lui-même. Les six autres branches lui envoient leur lumière... Dieu n’a certes pas besoin de la lumière du candélabre (Chabath 22b), mais la lumière du Chabath influence tous les jours de la semaine.

Le verset (Exode 27:20) commence donc par véatah, parce que dit l’Eternel à Moïse: «seul toi es en mesure de faire ressentir aux enfants d’Israël la sainteté du Chabath; seul toi peux leur apprendre à se préparer au Chabath et à mériter l’âme supplémentaire; par toi seul, ils éclaireront constamment tout ce qui les entoure.»

Nous pensons à ce point comprendre le rapport entre les sections hebdomadaires

Tetsavéh et Vayak-hel: Moïse explique d’abord aux enfants d’Israël l’essence de la sainteté du Chabath, qui expie le péché du veau d’or. Après avoir prescrit à Moïse de leur servir d’exemple, il réunit les enfants d’Israël et leur loua les vertus du Chabath, allusion à l’union et à l’entente parfaite. Le Chabath après-midi, après la prière de Min’hah, les Juifs se réunissent généralement dans les Yéchivoth et synagogues, et étudient le Midrach en compagnie de Sages de la Torah (Yalkout Chimoni, Vayak-hel 408). Ils brisent ainsi la kélipah, corrigent le péché du veau d’or, et se sanctifient par l’âme supplémentaire qu’ils ont reçue le Chabath.

 

 

PARACHAT TETSAVEH
TABLE DE MATIERE
L’éthique rapproche l’homme de Dieu

 

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