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Rabbi Avraham Tsevi Kamaï • Le Dernier Rav De La Ville Mir

Il y a eu dans la diaspora des villes grandes et petites qui sont devenues mondialement célèbres parce que c’étaient des lieux de Torah.

L’une de ces petites villes bénies était Mir. Elle s’est fait un renom éternel dans le monde juif par le mérite de la lumière de la Torah qui y a brûlé pendant plus de cent ans, à savoir la célèbre yéchivah de Mir, connue dans le monde entier.

La ville de Mir a aussi connu de grands rabbanim, riches en Torah et en sagesse. Le dernier Rav de la ville fur Rabbi Avraham Tsevi Kamaï, qui était grand par son érudition ainsi que par la noblesse de son caractère et de ses actes. Il était pur et sage, et d’une grande humilité.

Tout le monde l’aimait, à cause de sa délicatesse et de sa noblesse naturelles.

Rabbi Avraham Tsevi est né en 5620 (1860) dans la petite ville de Schkod, en Lituanie. Son père, Rabbi Eliahou Baroukh, était un grand Rav et un célèbre Roch Yéchivah.

Depuis sa plus tendre enfance, il manifesta une compréhension acérée et une mémoire solide, et il était connu comme un enfant prodige. C’était par nature un enfant faible au teint pâle, et son père ne voulut pas l’envoyer étudier à la yéchivah loin de la maison. Il resta chez lui et son père lui enseigna la Torah lui-même. Il acquis de grandes connaissances dans le Talmud et les décisionnaires, et à un âge encore jeune il était déjà connu comme un grand de la Torah.

Après son mariage avec la fille de Rabbi Moché Gorodjenski, de la ville de Keidan, il continua à étudier la Torah jour et nuit. Il ne voulait pas être Rav et utiliser la Torah à des fins personnelles, car par nature il avait l’âme noble et délicate, il était très humble et fuyait les honneurs.

Il choisit de gagner sa vie en ouvrant une pharmacie à Keidan, et le gaon et tsadik Rabbi Avraham Tsevi devint pharmacien. Les habitants de la ville préféraient acheter leurs médicaments chez le Rav tsadik, le « pharmacien », car ils croyaient qu’ainsi ils portaient chance et apportaient une guérison totale et rapide. Le Premier ministre de la Russie tsariste, Stolipine, quand il passait dans la région de Keidan, venait également en personne acheter ses médicaments chez « le talmudiste », car lui aussi croyait que les médicaments du pharmacien « talmudiste » apportaient la guérison.

On raconte encore qu’un certain Rav étant venu à Keidan, l’aubergiste chez qui il se trouvait lui servit un plat en l’assurant que le pharmacien en mangeait aussi. En entendant cela, le Rav interrompit immédiatement son repas, car à l’époque le pharmacien profanait le Chabat et c’était en général un juif assimilé. Le lendemain, quand le Rav vint à la synagogue pour prier, il vit qu’on attendait quelqu’un pour commencer la prière. Quand il demanda qui l’on attendait, on lui répondit que le pharmacien n’était pas encore arrivé. Il comprit alors qui était le pharmacien (du Rav Y. D. Epstein, dans son article sur la yéchivah de Mir).

Le Rav de Keidan vint à mourir, et les habitants de la ville vinrent demander au pharmacien d’être leur Rav. Rabbi Avraham Tsevi, qui avait pendant toute sa vie fui ce poste ainsi que tous les honneurs, ne voulait même pas en entendre parler au début. Il estimait qu’il avait déjà passé la plus grande partie de sa vie comme un homme « simple », un pharmacien, et il ne voulait pas au temps de sa vieillesse accepter la responsabilité de la ville. Après de très vives insistances, il accepta pourtant d’être leur Rav, mais à la condition qu’il continuerait à vivre de son commerce, de sa pharmacie.

Quand le bruit se mit à courir que Keidan, qui était un centre juif important, avait pris pour Rav le pharmacien de la ville, on comprit alors que ce pharmacien était un gaon et un tsadik. Tout le monde s’émerveilla qu’il ait réussi à cacher aux gens sa grandeur en Torah. Cette grande modestie l’accompagna pendant toute sa vie, même un fois qu’il fut reconnu dans le monde des yéchivot comme le successeur de son père, le gaon Rabbi Eliahou Baroukh, en tant qu’Av Beith Din et Roch Yéchivah de la yéchivah de Mir.

Son père Rabbi Eliahou Baroukh mourut pendant la première guerre mondiale, à Minsk. Tous les grands de la génération et des centaines de rabbanim qui s’étaient réfugiés à Mir participèrent à l’enterrement, parmi lesquels Rabbi ‘Haïm Soloveitchik, Rabbi Raphaël Schapira de Volojine, le Rav Schapira de Kovna et d’autres. Le gaon Rabbi Eliezer Rabinowitz, « le gadol de Minsk », annonça dans son oraison funèbre la nomination de Rabbi Avraham Tsevi, le Rav de Keidan, comme Av Beith Din et Roch Yéchivah de Mir. Il dit : « Devant nous se tient vivant Rabbi Eliahou Baroukh, plus jeune de trente ans que le Rabbi Eliahou Baroukh qui nous a quittés. » Rabbi Avraham Tsevi contesta ensuite les paroles du gadol de Minsk en disant qu’il n’y avait absolument aucune comparaison entre son père et lui.

Une nouvelle époque de sa vie commença à Mir. Il se fit aimer de la communauté et de tous ceux qui entraient en contact avec lui. La maison du Rav était ouverte à tous, et quiconque venait demander de l’aide était reçu aimablement. Bien qu’il ait été plongé dans les quatre coudées de la halakhah, il ne négligeait pas les affaires de la communauté, et il était comme un père dévoué envers les habitants de la ville et les élèves de la yéchivah. Un jour, quelqu’un de la ville attrapa la tuberculose. Les médecins lui ordonnèrent de quitter son petit appartement pour habiter un endroit plus grand. Le Rav le fit entrer chez lui, s’occupa de lui comme d’un fils, et il resta là jusqu’à son dernier jour.

Un jour, les médecins interdirent à sa sœur de jeûner à Yom Kippour. Avant le jeûne, il rentra chez elle pour lui rendre visite et vit que cela lui faisait beaucoup de peine de ne pas pouvoir jeûner pendant le jour saint. Alors il lui dit : « Je suis prêt à changer avec toi et à te donner la mitsva de mon jeûne à Yom Kippour en échange de ta mitsva de manger, en y rajoutant de mon côté encore quelques mitsvot. »

Tout en étant un Rav et un Roch Yéchivah célèbre, qui comptait parmi ses élèves des centaines de rabbanim et de talmidei ‘hakhamim, il se conduisait avec chacun de ses élèves et des habitants de la ville en ami et en frère. Il ne mit jamais personne en colère et ne fit jamais sortir de sa bouche des paroles dures. La sagesse illuminait son visage, et par son langage doux et agréable, il rapprochait les cœurs de la Torah et de la crainte du Ciel. Il était versé dans les affaires de ce monde et conscient de tout ce qui se passait, tout en restant innocent, droit et au cœur pur.

Un jour, il rentra dans une librairie et voulut acheter un livre de kinot pour Ticha BeAv. Le libraire lui demanda quarante peroutot. Le Rav marchanda et lui proposa vingt peroutot. Le libraire, étonné, dit au Rav : « Pardonnez-moi ! Vous avez déjà acheté chez moi des livres en payant sans jamais discuter sur le prix. Qu’est-ce qui se passe aujourd’hui ? » Le Rav lui répondit : « J’ai acheté les autres livres pour toute ma vie, mais le livre des kinot je ne l’achète que pour cette année, car l’année prochaine le Machia’h viendra, et je n’aurai plus besoin de kinot. Pour une seule année, vingt peroutot suffisent. »

Quand éclata la Deuxième guerre mondiale, la yéchivah passa à Vilna, mais le Rav dit qu’il resterait avec sa communauté et souffrirait avec elle.

Le 19 ‘Hechvan 5702 (1941), 2300 juifs de Mir furent assassinés, hommes, femmes et enfants, avec à leur tête leur Rav, le gaon et tsadik Rabbi Avraham Tsevi Kamaï.

Le Rav Zalman Miranker, originaire de Mir,  a raconté qu’il était là à ce moment-là : « Quand on a rassemblé tous les habitants pour les mener vers les tranchées creusées en dehors de la ville, le Rav a dit à tous les juifs : « Acceptez tout cela avec amour, comme le Tanna Rabbi Akiba qui à sa dernière heure a accompli « de toute ton âme », même s’Il te prend ton âme ! » » Il avait quatre-vingt deux ans quand il trouva la mort en martyr. Que Dieu venge son sang.

 

 
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